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Décision N°2022-206 du 14 octobre 2022 de la Défenseure des Droits relative à l’enfermement d’enfants au centre de rétention administrative de X.

Publié le mercredi 23 novembre 2022 , mis à jour le mercredi 23 novembre 2022

Résumé  :

"Depuis plusieurs années, le Défenseur des droits est saisi de la situation de mineurs placés en centre de rétention administrative (CRA) à X. Des pièces transmises par les avocats des enfants et les associations, et des décisions judiciaires rendues dans certains dossiers, il ressort l’existence de pratiques de rattachement d’enfants à des tiers qui leur sont inconnus, ou qui n’exercent pas l’autorité parentale à leur égard, ainsi que des modifications, sur les mesures d’obligation de quitter le territoire français (OQTF), de dates de naissance faisant apparaitre des adolescents comme majeurs.

Depuis 2019, plusieurs situations ont été portées à la connaissance du Défenseur des droits. Certaines d’entre elles ont fait l’objet de courriers d’instruction adressés à la préfecture. Ainsi, de manière récurrente, le Défenseur des droits a eu connaissance de situations dans lesquelles des enfants ont été rattachés à des tiers qui n’exercent sur eux aucune autorité parentale, avant d’être placés en CRA. Certains d’entre eux ont été éloignés du territoire de Mayotte.

Compte tenu des éléments recueillis dans le cadre de ses instructions et de ses interpellations régulières du préfet de X., la Défenseure des droits lui a adressé une note récapitulative, le 8 février 2022. Cette note étant restée sans réponse, la Défenseure des droits a adopté une décision sur la base des éléments à sa disposition qui a conclu que la pratique des autorités à X., de modification de dates de naissance ou de rattachement arbitraire d’enfants à un tiers qui n’exerce pas sur eux l’autorité parentale, portait une atteinte grave à l’intérêt supérieur des enfants et constituait une violation grave de leurs droits fondamentaux, notamment en raison des conséquences graves et irréversibles que ces pratiques peuvent avoir sur des personnes particulièrement vulnérables, à savoir des enfants.

La Défenseure des droits a conclu également à une atteinte grave au droit à un recours effectif des enfants placés en rétention administrative.
Elle a par conséquent, recommandé au ministre de l’Intérieur et au préfet de X. :
- De mettre un terme à l’enfermement des enfants en centre ou local de rétention administrative ;
- De mettre un terme aux pratiques de rattachement des enfants à un tiers qui n’exerce pas sur eux l’autorité parentale ;
- De mettre un terme aux pratiques de modification unilatérale de dates de naissance des adolescents interpellés aux fins de placement en centre de rétention administrative et d’éloignement ;
- De rappeler par tout moyen aux forces de l’ordre les textes relatifs aux contrôles d’identité selon lesquels d’une part, en cas de contrôle de l’identité, celle-ci peut se prouver par tout moyen et d’autre part, les mineurs étrangers ne sont pas tenus de posséder un titre de séjour ;
- De veiller, s’agissant du ministre de l’Intérieur, à ce que les autorités préfectorales respectent la jurisprudence du Conseil d’État et de la Cour européenne des droits de l’homme, en ce qu’elles doivent :
- Procéder à toutes les vérifications nécessaires afin de s’assurer qu’aucun enfant n’est enfermé en rétention en violation du droit applicable ;
- Vérifier systématiquement, avant tout éloignement, la réalité du lien entre le mineur éloigné et l’adulte auquel il est rattaché, ainsi que ses conditions de prise en charge effective au retour ;
- De mettre en place des alternatives à l’enferment des familles avec enfants conformément au respect du droit international et de l’intérêt supérieur des enfants.
- Dans le prolongement des demandes formulées par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe en exécution de l’arrêt Moustahi c. France,
- De garantir qu’un représentant légal soit systématiquement désigné auprès du MNA ;
- De garantir qu’un délai suffisant soit octroyé aux personnes sur le point d’être éloignées, afin de saisir utilement un juge et éviter toute violation similaire de leurs droits, et de respecter la saisine du juge des référés, dans tous les cas, conformément à la règlementation en vigueur.

La Défenseure des droits demande à être informée des suites données à cette décision dans un délais de trois mois."

Voir la décision au format PDF :

DÉCISION 2022-206 DU 14 OCTOBRE 2022 RELATIVE À L’ENFERMEMENT D’ENFANTS AU CENTRE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE DE X.

Voir en ligne : https://juridique.defenseurdesdroit...