Cour administrative d’appel de Nancy – Arrêt n° 21NC00164 du 21 juillet 2022 – Avis défavorable de la PAF sur les documents d’état-civil (absence de sécurité, anomalies des cachets, absence de l’ensemble des mentions prévues par les articles 175 et article 196 du code civil guinéen, émission expéditive du jugement supplétif) – Eléments qui ne sauraient remettre en cause l’identité de l’intéressé - Préfet enjoint de réexaminer la demande de TS

Résumé :

La Cour annule l’arrêté par lequel le préfet a refusé à l’intéressé un titre de séjour (sollicité sur le fondement de l’article L.313-15 – devenu L.435-3 du CESEDA) au motif que les documents d’état civil présentés seraient inauthentiques.

La Cour estime que malgré l’avis défavorable émis par la PAF sur les documents d’état civil, les seuls éléments relevés, l’absence de sécurité, les anomalies des cachets humides et secs, l’absence de l’ensemble des mentions prévues par les articles 175 et article 196 du code civil guinéen, et la manière expéditive par laquelle le jugement supplétif a été rendu, ne sont pas de nature à remettre en cause la valeur probante des documents d’état civil.

En effet, les anomalies des cachets secs et humides ne sont pas ceux du tribunal de première instance et du bureau de l’état civil de Conakry, mais ceux du " pavé de légalisation " ministère des affaires étrangères daté.

De plus, malgré la manière expéditive par laquelle le jugement supplétif a été rendu, aucun élément extérieur au jugement supplétif et à sa transcription ne permet de faire douter de ce que les faits qui y sont déclarés ne correspondraient pas à la réalité.

En outre, le requérant produit à hauteur d’appel la copie intégrale de son acte de naissance certifiée conforme et délivrée par l’attachée consulaire de l’ambassade de Guinée en France.

Par conséquent, l’état civil et en particulier la date de naissance du requérant sont établis.

La Cour annule la décision du préfet et enjoint à ce dernier à examiner la demande de titre de séjour du requérant, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’arrêt.


Extraits de l’arrêt :

« 11. Pour contester l’authenticité de ces actes, la décision de refus de titre de séjour en litige se fonde sur le rapport technique documentaire réalisé le 4 février 2020 par le service territorial de de l’antenne cellule fraude documentaire de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Pontarlier. Ce rapport énonce que les supports utilisés pour l’édition des documents produits par le requérant ne sont pas sécurisés, que les cachets secs et humides présentent des anomalies, que les actes ne contiennent pas l’ensemble des mentions prévues par les articles 175 et article 196 du code civil guinéen et que le jugement supplétif a été rendu de manière expéditive.

12. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les cachets critiqués par l’analyse documentaire ne sont pas ceux du tribunal de première instance et du bureau de l’état civil de Conakry, mais ceux du " pavé de légalisation " ministère des affaires étrangères daté du 11 décembre 2017. Par ailleurs, aucun élément extérieur au jugement supplétif et à sa transcription ne permet de faire douter de ce que les faits qui y sont déclarés ne correspondraient pas à la réalité. Enfin, le requérant produit à hauteur d’appel la copie intégrale de son acte de naissance certifiée conforme et délivrée par l’attachée consulaire de l’ambassade de Guinée en France, qui indique également qu’il est né le 2 juillet 2001 à Conakry. Dans ces conditions, les seuls éléments relevés dans le rapport de la police aux frontières ne sont pas de nature à remettre en cause la valeur probante des documents d’état civil produits par M. A. Par suite, contrairement à ce qu’a estimé le préfet du Doubs, l’état civil et en particulier la date de naissance du requérant sont établis.

13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens qu’il soulève, que M. A est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 30 juin 2020 par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Par voie de conséquence, les décisions concomitantes portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination doivent être annulées.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

14. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution ".

15. Les motifs de l’annulation prononcée au point 13 impliquent uniquement que le préfet du Doubs réexamine la demande d’admission exceptionnelle au séjour de M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans cette attente, du fait de l’annulation par voie de conséquence de l’obligation de quitter le territoire français, le préfet délivrera immédiatement à M. A une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l’article L. 614-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. »

Cour administrative d’appel de Nancy - 4ème chambre - formation à 3 21 juillet 2022 / n° 21NC00164
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