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Cour administrative d’appel de Douai – 2ème chambre - formation à 3 - Arrêt N°22DA00678 du 13 décembre 2022 – Annulation d’une OQTF – Erreur manifeste dans l’appréciation des conséquences de l’OQTF sur la situation de l’intéressé (pris en charge par l’ASE durant sa minorité, puis majorité) au regard des circonstances de l’espèce

Publié le : mercredi 31 mai 2023

Résumé :

La CAA annule l’obligation de quitter le territoire français prise par le préfet suite à l’interpellation de l’intéressé lors d’un contrôle d’identité et l’enjoint de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois.

La CAA retient en effet que, dans les circonstances particulières de l’espèce, le préfet a entaché sa décision d’une erreur manifeste dans l’appréciation des conséquences de cette OQTF sur la situation du jeune. Ce dernier a notamment été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance à l’âge de seize ans, puis à sa majorité, a suivi (puis validé) sa formation en CAP avec sérieux, a fait l’objet d’une note sociale témoignant de sa volonté d’intégration et il n’est pas établi qu’il entretiendrait des rapports avec sa famille restée dans son pays d’origine. Par ailleurs, la CAA souligne qu’il a accompli des démarches pour obtenir un acte de naissance afin de déposer une demande de titre de séjour (lesquelles n’ont pu aboutir en l’absence de son inscription dans les registres de l’état-civil marocain et de toute identification par empreintes).


Extraits de l’arrêt :

« 1. M. B A, ressortissant marocain né le 12 décembre 2002 […]. Il a été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance le 13 novembre 2019 jusqu’à sa majorité. A la suite de son interpellation lors d’un contrôle d’identité, le préfet du Nord, par un arrêté en date du 13 octobre 2021, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d’éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée de deux ans. […].

Sur l’appel principal :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A, âgé de plus de seize ans lors de son entrée en France en octobre 2019, a été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance du département du Nord. A sa majorité, il a bénéficié du contrat « Entrée dans la vie adulte » qui a été renouvelé à plusieurs reprises. L’intéressé a été scolarisé en première année du certificat d’aptitudes professionnelles (CAP) « serrurier métallier » [...] au titre de l’année scolaire 2020-2021 puis s’est inscrit, en deuxième année de CAP au titre de l’année scolaire 2021-2022. Les relevés de notes ainsi que les attestations de plusieurs professeurs et de son maître de stage produits à l’instance font état de son sérieux, de sa motivation, de son investissement dans le travail et des progrès qu’il a accomplis, notamment en langue française. M. A a d’ailleurs obtenu, postérieurement à l’arrêté attaqué, son CAP avec une moyenne de 14/20 et a validé sa deuxième année avec une moyenne de 15,7/20. Il justifie également de sa réussite au diplôme d’études en langue française de niveau A2 en juin 2021. En outre, le service d’accueil des jeunes "mineurs non accompagnés" […] qui le prend en charge a indiqué dans sa note sociale du 18 octobre 2021 qu’après dix-huit mois d’accompagnement, l’intéressé a gagné en maturité et en autonomie, qu’il s’est adapté sans difficultés à son nouvel environnement culturel, qu’il respecte le cadre posé par les adultes, que ses progrès en langue française sont remarquables et témoignent de sa volonté d’intégration. Par ailleurs, il n’est pas établi que M. A entretiendrait des rapports avec sa famille restée dans son pays d’origine, alors qu’il a indiqué aux éducateurs qui le suivent avoir rompu les liens avec ses parents à l’âge de treize ans. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l’intéressé a accompli des démarches en vue de l’obtention d’un acte de naissance afin de déposer une demande de titre de séjour, lesquelles n’ont pu aboutir en l’absence de son inscription dans les registres de l’état-civil marocain et de toute identification par empreintes. Dans les circonstances particulières de l’espèce, le préfet du Nord a, en faisant obligation à M. A de quitter le territoire, entaché sa décision d’une erreur manifeste dans l’appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation de l’intéressé. La décision portant obligation de quitter le territoire doit, par suite, être annulée et, par voie de conséquence, celle refusant à M. A l’octroi d’un délai de départ volontaire.

[…].  »