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Emmaüs accusé de maltraiter ses enfants et salariés en Gironde

Publié le 23-11-2018

Source : Rue89Bordeaux

Auteur : Xavier Ridon

Extraits :

«  Deux syndicats et un collectif de soutien aux enfants étrangers alertent sur la gestion des foyers Emmaüs. Le département se dit attentif, alors que le président de l’association en Gironde réfute les accusations et rappelle qu’il a du accueillir « trop et trop vite ».

Les oppositions sont franches et les remous nombreux autour de la gestion des foyers d’enfants par l’association Emmaüs.

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Dans une lettre ouverte adressée à Jean-Luc Gleyze, président du Conseil départemental en charge de l’enfance, ainsi qu’au préfet et à l’inspection du travail, les syndicats condamnent d’une même voix « une gestion inquiétante et un management destructeur ».

Leurs attaques visent un fonctionnement en suractivité, des sureffectifs de jeunes, des moyens d’encadrements insuffisants, des hébergements inadaptés, une dégradation de l’organisation du travail éducatif, mais aussi une absence de représentant du personnel au sein de l’association depuis juin 2017.

Pour eux, aucun doute, ces conditions « affectent tout à la fois les conditions de travail des salariés d’Emmaüs et la mission de protection des mineurs accueillis ». (...)

Climat de violence

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« Il y a des lits collés au sol avec jusqu’à sept personnes dans la même chambre de 9 m². Des tétrodons ont été installés dehors mais les jeunes les désertent car ils sont peu, voire pas chauffés. Ils seraient quarante répartis en trois chambres » accuse Harmonie Lecref, juriste à l’association de soutien aux travailleurs immigrés (Asti).

Celle-ci, ainsi que Médecins du Monde, la Ligue des droits de l’Homme, la Cimade, et le Réseau éducation sans frontière, s’étaient réunies ce jeudi lors d’une conférence de presse pour lister les maux de ce foyer. Harmonie Lecerf poursuit :

« Il n’y a pas d’accompagnement scolaire, pas de salle où ils peuvent travailler. Il règne un climat de violence, de menaces avec des fins de prises en charge. La direction affirme – même auprès de certains salariés – que tel ou tel jeune est en fait majeur, quitte à contredire la décision des juges pour enfant. »

Dysfonctionnements

Les jeunes éprouvent de grandes difficultés à ouvrir des comptes en banque pour encaisser le salaire que certains touchent en apprentissage. « Les employeurs s’en émeuvent » précise Françoise Astruc de l’Asti.

Le courrier ne serait pas toujours distribué, voire ouvert. Aude Saldana-Cazenave, de Médecins du Monde, alerte sur les difficultés d’accès à la santé physique et psychique après avoir constaté que des cartes vitales restaient dans le tiroir de la direction. Enfin, le collectif s’inquiète, autant que les syndicats, des départs à répétition : « une dizaine de démissions aurait lieu en 8-10 mois » selon Françoise Astruc.

L’attitude de la directrice du foyer, de la directrice du Pôle Enfance Emmaüs et du président de l’association est aussi dans la ligne de mire des associatifs. Ils parlent de conflits ayant pu déboucher sur la chute d’un jeune par-dessus une balustrade, une tentation chez un autre pour le suicide, des gaz lacrymogènes lancés au visage d’un troisième.

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Départs à répétition

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Les sur-effectifs ? « Il y a eu des habitats précaires mais tout est en place pour que ce soit résorbé. »

Manque de nourriture ? « Il y a eu un bras de fer car il n’est pour nous pas question de servir de la nourriture hallal. » Une partie des jeunes étant musulmans.

Des cartes vitales gardées dans les tiroirs de la direction ? « N’importe quoi ! »

Pas de compte bancaire ? « Il faut des papiers qu’ils n’ont pas. »

Pas d’éducateurs ? « Tout est réglementé. Mais bien sûr les veilleurs de nuit, les chauffeurs, etc. n’ont pas de formation d’éducateurs. »

Des sous-effectifs ? « C’est scandaleux. On est passé de 34 à 50 salariés et la capacité d’accueil a été multipliée par trois. »

Une directrice incompétente ? « Elle est meurtrie qu’on puisse dire qu’elle n’est pas qualifiée. »

Manque de financement ? « On a les moyens pour assurer le fonctionnement au quotidien. »

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Procédure d’alerte

Les associations rencontrent par ailleurs ce vendredi la conseillère départementale en charge de l’enfance, Emmanuelle Ajon. Visiblement surprise du fossé entre les analyses des associations, syndicats versus direction, elle compte avancer avec prudence :

« Oui, il y a un problème sur le foyer d’accueil. Nous ne sommes pas à la norme qualitative que nous attendons. Nous sommes toujours dans une notion de progrès, c’est évident. Nous mettons à disposition nos inspecteurs enfance. »

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L’élue socialiste ponctue :

« Il y avait une urgence. On y a répondu. Peut-être notre erreur a été d’avoir accepté l’urgence. »

Pascal Lafargue semble aller aussi dans ce sens :

« On a accueilli trop et trop vite – parce qu’on me l’a demandé et pas parce que nous l’avons demandé. »

Françoise Astruc lance l’idée qu’il « faut sortir les jeunes de ce foyer » si rien ne bouge. Emmanuelle Ajon promet de lancer une procédure d’alerte si le besoin est présent, ajoutant qu’un signalement a par ailleurs déjà fait été concernant l’état d’un des jeunes du foyer. Pascal Lafargue indique que l’ouverture très prochaine d’un centre à La Réole permettra de dégager une quinzaine de places. Reste à savoir si cela est suffisant. »

Voir en ligne : https://rue89bordeaux.com/2018/11/e...