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Les rêves de gosse ignorent les frontières…

Publié le 19-12-2018

Source : La Dépêche

Auteur : Pierre Challier

Extraits :

«  Dans les yeux de Mohamed K., les quatre minutes les plus longues de sa vie. Le temps qu’il faut pour traverser en train le tunnel de Portbou à Cerbères, passer la frontière de l’Espagne vers la France. (...)

Ce soir, il dormira peut-être chez son frère, qui travaille à Nîmes, « avec les papiers, un bon boulot », explique-t-il, fier. Du pouce sur l’écran, il fait apparaître un homme élégant devant la Maison Carrée. Mais entre les deux, il y a la frontière. Et lui n’a pas de papiers. Tout à l’heure, la police espagnole l’a contrôlé. Sourire « à quoi bon » d’un barbu débonnaire… Il s’est cru sauvé.

« Comment, il y a aussi des contrôles côté français ! ? Moi, on m’avait dit que c’était bon si les Espagnols te laissaient passer… » En découvrant que la police aux frontières peut aussi l’attendre à Cerbère, il s’est décomposé.

« On aime la France »

Mais il est tard. Les Français ont fini leur journée. Le lycéen reprend son rêve « faire une formation de coiffeur » parce que « chez moi, même avec les études, il n’y a pas d’avenir ». Et puis « Tu vois, nous, on a servi la France, on aime la France », sourit-il. En viatique « pour montrer aux autorités » au cas où… il a aussi sur son portable le relevé militaire du grand-père de Guercif (…).

Depuis des mois, Mohamed suit le téléphone arabe des « harragas », mot populaire pour désigner les jeunes sans-papiers qui tentent la traversée vers l’Europe. Tout l’été, il a zoné en Espagne. Ses copains de SMS lui avaient promis qu’il y aurait du travail à Murcie. (...)

« Il y a une accélération depuis un an », constate aussi José (prénom changé), depuis plus de vingt-cinq ans à la gare de Cerbère. « (...) Il y a ceux qui prennent le train et ceux qui risquent leur vie à pied par le tunnel, c’est un miracle qu’il n’y ait pas encore eu de mort », poursuit-il. (...)

« Car il y a de plus en plus de gosses, des Marocains de 15-16 ans, l’autre jour des Maliens, des Sénégalais de 13-14 ans », pointe José. Emmitouflés dans des parkas et des anoraks fripés, Fodé et ses copains de Bamako font à peine plus âgés, au pied du Super Frontera aux whiskies en promo. Ce matin ? On est au Perthus, autre passage obligé pour nombre de migrants.

(...) « Et nous, qu’est-ce qu’on ferait à leur place, à leur âge ? », s’interroge une dame à la gare de Cerbère, devant Mohamed. (...) »

Voir en ligne : https://www.ladepeche.fr/article/20...