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Un monde de fou, ou Comment sont traités les mineurs isolés étrangers

Publié le 27-03-2019

Source : Mediapart

Auteur : Yves Canu

Extraits :

«  Lundi 18 mars 10 heure du matin on recueille à la gare de Chateaucreux (Saint-Etienne) un jeune mineur africain en provenance de Vintimille. Il a quitté son pays d’origine en septembre 2018, il a aucun document d’identité et dit avoir 16 ans. Pourquoi est-il arrivé à Saint-Etienne, nul ne le sait

(...)

Pourquoi est-il arrivé à Saint-Etienne, nul ne le sait peut-être même pas lui même. Qu’importe de toute façon il est là et avec le copain de la Cimade, après lui avoir proposer de se restaurer nous l’accompagnons au conseil départemental (CD), service MNA (mineur non accompagné). La secrétaire qui nous reçoit nous explique qu’il aura son entretien d’évaluation (entendez par là un interrogatoire avec un travailleur social qui va évaluer s’il est bien mineur) ce jour même ou demain et qu’il sera hébergé.

Nous lui avons donné quelques conseils pour cet entretien que nous savons être une épreuve difficile, les évaluateurs n’étant pas toujours bienveillant. Nous lui laissons nos coordonnées au cas où…

Mardi 19 fin d’après-midi, il nous appelle le CD déclare que rien ne lui permet d’attester de sa minorité, motif suffisant pour ne pas le prendre en charge. Le brave garçon se retrouve à la rue sans sous, sans toit, rien ! C’est ainsi que la France accueille les mineurs isolés !

(...)

Sans beaucoup d’espoir nous contactons le 115 mais comme à l’accoutumée la réponse attendue nous est donnée, le 115 n’héberge pas les mineurs. Ils ne sont pas habilités pour cela, c’est une trop grosse responsabilité pour eux, « imaginez-vous s’il est mineur ». Il reste bien sûr la possibilité à notre jeune africain de mentir sur sa date de naissance et de se vieillir de quelques années mais là plus aucune chance de prise en charge en tant que mineur.

Face à cette partie de ping pong entre le CD qui ne le reconnaît pas mineur et le 115 qui a peur d’héberger un mineur, nous décidons d’alerter la justice en signalant un enfant en danger. Après de multiples appels sans réponse nous finissons par joindre une interlocutrice, qui nous demande de signaler la situation de ce jeune homme par FAX. Je croyais ce moyen de communication obsolète mais cela ne semble pas être le cas au palais de justice. Notre interlocutrice nous explique que l’on a plus de chance d’être lu si nous envoyons un fax que si nous envoyons un mail. On finit par trouver un fax mais nos multiples tentatives d’envoi restent vaines. Nous finissons donc par envoyer un mail. Le procureur nous répondra froidement le lendemain que le CD a bien fait son travail d’évaluation et que le jeune homme a la possibilité de faire un recours auprès du juge des enfants.

Il n’est pas précisé que l’attente pour passer devant le juge des enfants est de minimum 6 semaines et peut aller jusqu’à quelques mois. Dans cet interval, pas de prise en charge, on laisse les jeunes à la rue et quand on sait que c‘est un jeune sur deux que le CD recale, il y a de quoi devenir enragé. Sans la solidarité on verrait dans notre ville quelques dizaines de jeunes africains erraient sans moyen de subsistance et sans toit.

Ces jeunes n’existent pas, ni mineur, ni majeur ce sont des fantômes, personne n’est responsable et les pouvoirs publics les laissent ainsi à la merci de tous les dangers…. C’est en France ce que l’on appelle toujours la protection de l’enfance.  »

Voir en ligne : https://blogs.mediapart.fr/yvesscan...