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Le maire d’Aubière dénonce l’abandon des jeunes mineurs par l’ASE lorsqu’ils deviennent majeurs

Publié le 20-05-2019

Source : Mediacoop

Auteur : Sébastien Massoulié

Extraits :

«  Au soir du vendredi 17 mai, le maire d’Aubière Christian Sinsard s’est trouvé confronté à un cas qui, malheureusement, ne fait plus exception en France. En pleine nuit, son statut d’élu l’a conduit à rencontrer un gamin âgé de dix-huit-ans, sans ressources ni logement. Ce jeune homme venait de sortir le jour-même du Centre hospitalier Sainte-Marie (service de santé mentale). Démuni, il s’était réfugié dans l’un des hôtels de la ville. Alerté par le patron de l’établissement, l’édile communiste s’est directement rendu sur place afin de trouver une solution pour ce garçon visiblement malade. Marqué par cet épisode nocturne, il a souhaité faire part de son inquiétude quant à la prise en charge de ces jeunes livrés à eux même une fois leurs dix-huit printemps révolus. A travers ce cas singulier, le maire d’Aubière entend dénoncer les dysfonctionnements de tout un dispositif de prise en charge inhérent à l’Aide Sociale à l’Enfance. C’est en compagnie de Magali, responsable du CCAS (Centre communal d’action sociale), que Médiacoop a pu s’entretenir avec lui.

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Médiacoop : Quelles particularités présentait ce garçon ?

Christian Sinsard : Ce jeune homme venait d’avoir ses dix-huit ans le jour-même de notre rencontre. En l’interrogeant, j’ai appris qu’il venait d’être hospitalisé à temps plein pendant trois années pour une affection psychiatrique sévère à l’hôpital Sainte-Marie. Il n’y avait pas besoin d’un médecin pour s’apercevoir que ce jeune souffrait d’une sérieuse maladie. Or, il venait de quitter l’établissement hospitalier la veille. Démuni, il s’est présenté à l’hôtel mais le patron de l’établissement ne pouvait pas l’héberger car le garçon en question n’était pas lié par contrat à l’ASE. D’ailleurs, depuis qu’il est majeur, il ne dépend plus de l’ASE et c’est bien là qu’est le problème que je souhaite évoquer.

Médiacoop : Comment avez-vous réagi face à un tel cas ?

Christian Sinsard : J’ai contacté l’ASE par téléphone en leur expliquant la situation. Ils m’ont dit qu’ils ne pouvaient plus rien faire pour cette personne. D’après eux, son cas ne les concernait plus puisqu’il venait d’avoir dix-huit ans. C’était un peu comme si l’on m’avait dit : “ Circulez, il n’y a rien à voir”. Vu l’état du garçon, j’étais quand même surpris que l’hôpital l’ait lâché dans la nature alors qu’il n’avait pas d’endroit où loger. Il n’avait aucun papier d’identité sur lui, aucunes ressources. Alors, j’ai appelé l’hôpital Sainte-Marie. Effectivement, ils le connaissaient bien mais ils m’ont répondu que ce jeune était majeur désormais. D’après eux, c’est lui qui aurait désiré sortir malgré le fait que l’établissement lui ait proposé de poursuivre sa prise en charge

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Médiacoop : La loi peut-elle venir répondre à ce dysfonctionnement que vous soulevez aujourd’hui ?

Magali [responsable du CCAS] : Oui, la loi prévoit certaines choses. Selon les textes, l’ASE est tenue de pouvoir proposer une prise en charge pouvant aller dans certains cas jusqu’à l’âge de vingt-et-un an dans le cadre d’un contrat appelé “jeune-majeur”. Finalement, c’est une procédure qui aurait pu couler de source. Néanmoins, on n’en voit quasiment plus aujourd’hui. Et si le “contrat jeune-majeur” n’est pas envisageable, il est souhaitable que la sortie de ces mineurs soit préparée en amont. Il y a quelque mois, j’ai reçu un jeune le jour de ses 18 ans. Maintenant, il se trouve dans l’un de nos logements d’urgence parce qu’il a bien fallu qu’on trouve une solution. À cet âge-là, ils sont sans ressources ; ils ne relèvent d’aucuns droits sociaux. Lui non plus ne possédait pas de carte d’identité. Si l’ASE n’est pas en capacité de signer avec eux un contrat “jeune-majeur”, ces gamins pourraient au moins bénéficier d’une carte d’identité et de droits ouverts à la sécurité social pour faire des démarches. Malheureusement, ils ne peuvent pas les faire car aucun document ne leur ait donné.

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Médiacoop : Concrètement, que dénoncez-vous aujourd’hui ?

Christian Sinsard : Je dénonce le fait qu’on laisse ces jeunes dans la nature. L’ASE n’est pas l’unique responsable dans ce cas précis, l’hôpital psychiatrique a sa part de responsabilité. Les élus doivent subir les conséquences des carences du système de santé et du système social en France. J’ai fait ma carrière dans la Sécurité Sociale. J’ai la plus haute opinion de cette institution qui est la meilleure au monde, il n’empêche qu’il y a des failles. En tant que maire, je me suis retrouvé complètement démuni face à ce cas. Je n’ai pas pu avoir la Préfecture ; je ne savais pas qui contacter. Comment se fait-il qu’on lâche les jeunes lorsque ces derniers atteignent leurs dix-huit ans ? C’est honteux que l’ASE abandonne ces jeunes lorsqu’ils atteignent leur majorité. On les met dehors, sans suivi.  »

Voir en ligne : http://mediacoop.fr/le-maire-daubie...