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Adrien Durousset, ancien enfant de l’ASE “La protection de l’enfance est à revoir”

Publié le 10-01-2020

Source : ASHn°3141

Auteur : Brigitte BÈGUE

Extraits :

«  Placé très tôt, Adrien Durousset aimerait oublier ce passé qui lui colle à la peau… Difficile, quand on a été délaissé par des parents défaillants et que l’on a l’impression que la protection de l’enfance tout comme l’école ne vous ont pas véritablement épaulé.

Y a-t-il quelque chose de commun entre les enfants placés et ceux des cités ?

« Dans les deux cas, les jeunes sont délaissés par l’Etat », accuse Adrien Durousset. Le jeune homme de 27 ans sait de quoi il parle : placé à l’âge de 5 ans, il a relaté ses quatorze ans d’enfant de l’aide sociale à l’enfance (ASE) dans son premier livre, Placé, déplacé, sorte de journal de bord qu’il tenait depuis le collège, où il est question de violence, de maltraitance et d’une famille d’accueil qui s’est radicalisée et qu’il a dû fuir. Dans un nouvel ouvrage, De foyers en cités, itinéraire d’un abandonné de la République, il raconte sa sortie de la protection de l’enfance, livré à lui-même.

En janvier 2010, il se rend pour la dernière fois dans le bureau du juge du tribunal pour enfants de Lyon, où son dossier n° 404-044 est en passe d’être définitivement refermé. Adrien Durousset est majeur, deux options s’offrent à lui : soit la rue, soit un contrat « jeune majeur ». Malgré le pessimisme de la magistrate, il choisit la seconde solution, la moins pire. Car avec les 450 € qui lui sont alloués chaque mois, il survit. « Mon loyer me prenait la moitié de cette somme, je devais payer le transport et les courses. En plus, au mois d’août, la responsable “enfance” du département avait pour habitude de suspendre l’allocation qui était ma seule ressource. Il m’arrivait souvent de ne pas déjeuner le midi ou d’aller chercher à manger au Secours populaire. »

En 2013, l’ex-enfant placé décroche un bac pro, il a 21 ans, et c’est la fin de son contrat « jeune majeur ». Vers qui se tourner ? Plus suivis par le conseil départemental, certains jeunes sont cantonnés à retourner chez leurs parents biologiques, avec lesquels ils n’ont parfois aucun lien, ou à vivre de la garantie « jeune » ou du RSA (revenu de solidarité active) à partir de 25 ans. D’autres, encore, viennent grossir les rangs des exclus : 40 % des SDF de moins de 25 ans sont d’anciens enfants placés. Adrien Durousset, lui, est parti habiter une cité en périphérie de Lyon. « Je n’avais pas d’argent pour habiter ailleurs », dit-il. Là, il va tenter de subsister avec une allocation logement.

(...)

« L’entreprise m’a sauvé »

Adrien Durousset ne veut pas de ce monde-là. Alors, pour s’en sortir, il décide de reprendre ses études en alternance. Un ancien directeur de stage l’encourage et, en 2018, il obtient son BTS de comptabilité. Il prépare actuellement une licence tout en travaillant à plein temps dans l’immobilier. Son objectif : faire un master et avoir un poste dans la finance ou la banque, pas dans le secteur social. « C’est le monde de l’entreprise qui m’a sauvé. Le milieu de l’expertise comptable est très rigoureux, ça m’a stimulé, assure-t-il. Je regrette que l’ASE ne nous prépare pas assez à ça. Plein d’enfants placés n’arrivent pas à s’insérer sur le marché du travail car ils n’ont pas les codes. Il faudrait mettre en place des partenariats avec des entreprises, développer les formations, créer des internats d’excellence… » Selon lui, d’ailleurs, c’est tout le système de la protection de l’enfance qu’il faudrait revoir. (...)

Aux assises nationales de la protection de l’enfance, où il a été invité en 2017, un dîner de gala a été organisé dans les salons de la préfecture. Il s’assoit à table, regarde le décor somptueux, les assiettes en porcelaine, les couverts en argent : « Tout ce luxe m’a semblé déplacé au regard du manque de budget dans le secteur. En plus, ce sont des jeunes de l’ASE qui nous servaient. Je suis rentré dans ma cité, écœuré. »  »

Voir en ligne : https://www.ash.tm.fr/hebdo/3141/po...