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« Emmanuelle Ajon : « Ce qui me dérange, c’est qu’on assimile tous les mineurs non accompagnés à des délinquants » »

Publié le 10-08-2020

Source : Actu.fr

Auteur : Damien Renoulet

Extraits :

« La problématique des mineurs non accompagnés empoisonne la justice et la police bordelaise. Il s’agit d’une compétence du Département. Emmanuelle Ajon, vice-présidente, répond.

(...)

Emmanuelle Ajon, vice-présidente du Département de la Gironde, chargée de la promotion de la santé et protection de l’enfance, livre son sentiment sur un dossier sensible et à forte charge émotionnelle.

Que vous inspire cette hausse de la délinquance à Bordeaux qui serait liée à la présence de ces mineurs non accompagnés ?

« Il faut faire le distinguo entre les mineurs non accompagnés qui sont confiés par la justice, qui sont en recherche de protection et que le Département accompagne. Il s’agit de personnes provenant à 60% de l’Afrique subsaharienne (Mali, Guinée, Côte d’Ivoire…), ayant un parcours migratoire traumatisant, qui ont fui la misère et qui cherchent à s’intégrer. Ils sont plus de 1 500 en Gironde (1). Ces jeunes ne sont pas les mêmes que ceux que l’on trouve dans la rue, originaires du Maghreb et qui sont avant tout des victimes de la traite des êtres humains. Pour moi, ce sont des mineurs mal accompagnés sous la coupe de réseaux mafieux ou semi-mafieux, ne voulant pas être pris en charge. Pour la plupart, ils se trouvent sous addictions fortes (drogues, alcool) et sous l’influence d’adultes malveillants. Et peuvent attaquer pour une raison insignifiante ou pour un simple regard. »

Comment arriver à enrayer ce phénomène et sortir ces mineurs de ces réseaux ?

« Une cellule spéciale MNA a été créée au commissariat central de Bordeaux (20 policiers ont rejoint la brigade VTT). Ces jeunes mineurs que je qualifie de mal accompagné ont besoin d’un accompagnement fort pour traiter leur addiction. Ces jeunes ont un manque d’accès aux soins, notamment au niveau pédopsychiatre. Cela relève de l’État. Il faut aussi casser ces réseaux de traite humaine. Dans cette problématique, il faut travailler ensemble et construire une organisation qui englobe toute cette globalité. »

À plusieurs reprises, les Départements ont fait part, devant les juridictions administratives, de leurs difficultés à mettre en œuvre l’ensemble de leurs obligations en matière de MNA face à un afflux considérable. Est-ce le cas en Gironde ?

« En ce moment, il n’y a pas de gros afflux. La Covid-19 (coronavirus) a mis un frein à la migration. Nous avons plutôt un flux qui est en train de se calmer, qui stagne. »

Combien coûte au Département la prise en charge d’un mineur non accompagné ?

« La protection de l’enfance ne fait pas de distinction entre enfant français et étranger (2). Le coût moyen est de 50 000 euros par an et par jeune confié à l’aide sociale à l’enfance. Il faut les loger, les nourrir, les accompagner. L’absence parentale a un coût (3). »

Le Département a-t-il les moyens financiers d’organiser leur prise en charge ?

« L’enveloppe budgétaire liée à la protection de l’enfance a augmenté de quasiment 25%, passant de 178 millions d’euros il y a cinq ans à 250 millions d’euros aujourd’hui. Cette hausse n’est pas seulement liée à l’accroissement du nombre de jeunes confiés à l’aide sociale en Gironde. Nous sommes aussi dans du qualificatif. Nous investissons sur ces jeunes afin qu’ils puissent réussir leur intégration, en les accompagnant jusqu’à l’âge de 21 ans. Ces jeunes, c’est un vrai pari d’avenir pour nous. »

Pour pallier aux manques de places, des familles bénévoles accueillent-elles des mineurs isolés ?

« Ce que nous avons mis en place depuis trois ans, c’est une convention de parrainage qui peut amener une famille, reconnue par le juge des enfants, à accueillir un jeune le week-end ou de manière permanente. Pour l’instant, le nombre de familles n’est pas très important, moins de cinquante sur la Gironde, parce que c’est un métier. (...) » »

Voir en ligne : https://actu.fr/nouvelle-aquitaine/...