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Mineurs isolés : « Des pratiques contraires à la convention internationale des droits de l’enfant »

Publié le 12-10-2020

Source : L’Humanité

Auteure : Eugénie Barbezat

Extraits :

« Un rapport publié la semaine dernière par un collectif d’associations pointe les manquements des autorités dans la protection des mineurs étrangers aux frontières. ENTRETIEN.

Chargée de projet au sein de la Coordination d’actions aux frontières intérieures (Cafi), un collectif interassociatif fondé par la Cimade, le Secours catholique, Médecins du monde, Médecins sans frontières et Amnesty International, Agnès Lerolle détaille les maltraitances et le défaut de prise en charge des enfants aux frontières. Des manquements graves de l’État français, qui laisse ces enfants en proie aux réseaux criminels.

Quelles constatations avez-vous faites aux frontières italienne et espagnole ?

AGNÈS LEROLLE Depuis 2015, les contrôles aux frontières sont renforcés. Toutes les personnes d’apparence étrangère se font interpeller et sont amenées au poste de police si elles ne peuvent présenter de documents en règle. Parmi ces personnes se trouvent des mineurs isolés. Quand on leur laisse la possibilité de donner leur âge et que la police aux frontières les croit, les services de l’aide sociale à l’enfance (ASE) sont alertés et viennent chercher ces jeunes pour les mettre à l’abri.

Mais le plus souvent, les jeunes n’ont pas la possibilité de se déclarer mineurs, faute d’interprète, notamment, et ils sont traités comme des adultes. Ils peuvent alors se retrouver enfermer pendant des heures dans des locaux insalubres… Pire, même si les jeunes affirment avoir moins de 18 ans, les agents de la PAF prennent parfois la liberté d’indiquer une autre date de naissance que la leur sur leur « refus d’entrée », et ils sont ainsi refoulés de l’autre côté de la frontière italienne ou espagnole. C’est contraire à ce que prévoit la convention internationale des droits de l’enfant, mais ce sont des pratiques courantes. Malgré le déni des préfectures concernant ce phénomène, nous avons rencontré beaucoup d’enfants qui avaient été traités de la sorte à Irun et à Vintimille.

Certains, avec l’aide d’associations, ont pu saisir (depuis l’Italie) le tribunal de Nice, qui a rendu plusieurs arrêts en leur faveur, reconnaissant l’inscription d’une fausse date de naissance sur les documents remplis par la PAF. Reste que ce défaut de prise en charge et ces refoulements abusifs ont pour conséquence que ces enfants, déterminés à venir en France, vont prendre des routes plus dangereuses, au péril de leur vie.

Dans le nord de la France, les côtes en face de l’Angleterre sont aussi le théâtre de situations dramatiques…

AGNÈS LEROLLE En septembre, les associations ont rencontré à Calais 173 enfants en errance. Le plus jeune avait 10 ans. En août, ils étaient 264. La Défenseure des droits, Claire Hédon, y a, en une journée, rencontré plusieurs mineurs de 12 et 14 ans… Sachant qu’aucun recensement exhaustif n’est possible du fait du déplacement constant de ces personnes, chassées quotidiennement par la police des lieux où elles dorment, au nom de la doctrine « pas de point de fixation ». C’est au nom de ce même « principe » que les forces de l’ordre saccagent leurs affaires et les empêchent d’accéder à des distributions alimentaires (désormais criminalisées) et même à des points d’eau. Claire Hédon a parlé de « véritable déni d’existence » à leur sujet. Quant à faire connaître leurs droits à ces adolescents, c’est très difficile car les associations ont beaucoup de mal à les approcher, au regard de leur mobilité forcée permanente. Les maraudes mises en place par l’association France terre d’asile ne suffisent pas à toucher tous les enfants. De plus, l’autre point d’entrée vers l’ASE que constituent les commissariats est banni par ces jeunes. Ils ont une absence totale de confiance envers l’uniforme au regard des maltraitances qu’ils subissent jour et nuit de la part des forces de l’ordre. Ce harcèlement violent est facteur de graves traumatismes chez les enfants.

(...) »

Voir en ligne : https://www.humanite.fr/mineurs-iso...