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Paris : Depuis trois mois, des mineurs isolés campent place de la Bastille dans l’espoir d’être régularisés

Publié le 26-08-2022

Date de la publication : 26/08/2022
Source : 20 Minutes
Autrice : Mathilde Desgranges

« L’association d’aide aux exilés Utopia 56 a installé un campement pour accueillir des mineurs isolés sur la place de la Bastille.

Depuis trois mois, une soixantaine de jeunes occupent nuit et jour la place de la Bastille. Les bénévoles de l’association d’aide aux exilés Utopia 56 ont investi un espace inoccupé de la place pour installer trente tentes grises et bleues. Ce sont "des enfants avant d’être des migrants", rappelle l’association sur une pancarte affichée à la vue de tous. Entouré de barrières, le campement est surplombé par une pancarte actualisée chaque jour. Ce jeudi, les passants peuvent y lire "mineurs à la rue depuis 90 jours".

Ces jeunes se sont vu refuser l’accès à la protection de l’enfance. Partout en France, le département doit se charger d’établir si les jeunes exilés sont effectivement mineurs. Une compétence déléguée à l’association France terre d’asile en Ile-de-France. Et pendant leur recours auprès du juge des enfants, c’est Utopia 56 qui leur vient en aide, sachant que la procédure peut durer deux à trois mois, selon les bénévoles de l’association.

"On a organisé cette manifestation parce qu’on est tous les jours sur le terrain avec des mineurs isolés, résume Luc, responsable du pôle d’Utopia 56 chargé des mineurs. Il existe peu de structures pour les prendre en charge et on demande l’ouverture d’un centre adapté ou la création de nouvelles places dans les structures existantes."

"Il faut nous enlever de la rue"
"Un jour, mon grand frère m’a dit de faire mon sac", raconte Dosdo, mineur isolé de 16 ans. Peu de temps après avoir perdu son père, le jeune homme a décidé de suivre son frère dans une périlleuse traversée de la mer Méditerranée, pour rejoindre la France depuis la Côte d’Ivoire. Les yeux mouillés, il raconte avoir fini le voyage seul. Depuis trois mois, Dosdo dort sur les trottoirs de la capitale parisienne, dans une tente fournie par Utopia 56. "Je ne vais pas dire que je regrette, je suis ici, c’est comme ça", affirme-t-il. Entendu par l’association France terre d’asile, après son arrivée en France, il espère pouvoir bénéficier de la protection de l’enfance. "Tout ce que je veux, c’est pouvoir suivre une formation et apprendre", confie le jeune homme, avant d’ajouter "je voulais simplement devenir quelqu’un".

"Il faut nous enlever de la rue, demande Ouaééra, jeune Ivorien de 15 ans arrivé à Paris la semaine dernière. Vivre à la rue, cela mène à voler, à entrer dans des gangs et ce n’est pas ce qu’on veut." Pour faire passer le temps et occuper les jeunes, les bénévoles d’Utopia 56 organisent des activités. Cours de boxe et jeu de cartes sont notamment proposés pour "faire passer le temps et éviter qu’ils errent dans Paris", explique Salomé, en service civique chez Utopia 56. "On travaille avec d’autres associations pour leur apporter de l’aide juridique, médicale et psychologique, ajoute-t-elle. Beaucoup nous demandent des cours de français mais, pour cela, on a plus de mal à les aider."

"50 % des jeunes finalement reconnus mineurs"
A mesure que le ciel se couvre, les visages se ternissent et les sourires s’effacent. "Là je parle, mais en même temps je regarde là-haut, confie Dosdo, en désignant les nuages du doigt. La seule chose à laquelle j’arrive à penser, c’est qu’il va bientôt pleuvoir." Les autres jeunes à côté de lui acquiescent. "Quand il pleut, on ne peut pas du tout dormir, complète Condé. Même dans la tente, on est mouillés." Ces jeunes, "qui seront vraisemblablement reconnus mineurs, auront dormi dehors pendant deux ou trois mois, dénonce Luc. Près de 50 % de ceux qui sont refusés après leur entretien sont finalement reconnus mineurs, après leur recours devant le juge. "

Pour cette raison, l’association interpelle les pouvoirs publics pour la création d’une structure adaptée à l’accueil des jeunes pendant la durée de leur recours. "On a eu une réunion avec la Mairie de Paris, deux semaines après le début de notre manifestation sur la place de la Bastille, explique Luc. La mairie s’est dite favorable à une augmentation des places d’accueil pour ces jeunes mais elle renvoie la balle à l’Etat en disant qu’ils n’ont pas les financements." Contactées, la Mairie de Paris et la préfecture d’Ile-de-France n’ont pas apporté de réponses. L’association compte maintenir le campement aussi longtemps que nécessaire. "On n’a pas de raisons de partir tant qu’on n’a pas de garantie de l’ouverture d’un centre ou de plus de places d’accueil", assure Luc.


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