Les mesures auxquelles sont exposé·es les jeunes majeur·es isolé·es étranger·es

Attention. Article en cours de mise à jour (modifications de la loi du 26 janvier 2024)

L’OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS

1. PRÉSENTATION DE L’OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS
L’obligation de quitter le territoire français (OQTF) est une mesure administrative d’éloignement des étranger·es prévue par les articles L610-1 à L615-2 du CESEDA (et L251-1 à L251-8 concernant les citoyens de l’UE et membres de leur famille).
Cette mesure a été introduite par la loi du 24 juillet 2006 et mise en application par le décret du 23 décembre 2006. La loi du 16 juin 2011 en a ensuite fait la mesure de droit commun en ce qui concerne l’éloignement de l’étranger·e non communautaire.
Elle est prise et notifiée par le Préfet et accompagnée de la décision fixant le pays de renvoi.

REMARQUE : L’OQTF est à différencier d’une décision d’expulsion (qui peut être prononcée, sous conditions, si la présence de la personne étranger·e en France constitue une menace grave pour l’ordre public) - art L630-1 à L632-7 du CESEDA


2. MISE EN ŒUVRE DE L’OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS

  • Article L611-1 du CESEDA : « L’autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu’il se trouve dans les cas suivants :
    1° L’étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s’y est maintenu sans être titulaire d’un titre de séjour en cours de validité ;
    2° L’étranger, entré sur le territoire français sous couvert d’un visa désormais expiré ou, n’étant pas soumis à l’obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s’est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d’un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré ;
    3° L’étranger s’est vu refuser la délivrance d’un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de l’autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s’est vu retirer un de ces documents ;
    4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l’étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu’il ne soit titulaire de l’un des documents mentionnés au 3° ;
    5° Le comportement de l’étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l’ordre public ;
    6° L’étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois a méconnu les dispositions de l’article L. 5221-5 du code du travail.
    Lorsque, dans le cas prévu à l’article L. 431-2, un refus de séjour a été opposé à l’étranger, la décision portant obligation de quitter le territoire français peut être prise sur le fondement du seul 4°.
     »

ATTENTION : lorsque l’OQTF accompagne une décision motivée de refus de délivrer ou de renouveler un titre de séjour, elle n’a pas à faire l’objet d’une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour.

  • L’OQTF fixe également le pays de destination prévu en cas d’exécution forcée de la décision.

Un mineur ne peut pas faire l’objet d’une OQTF : voir en ce sens l’art. L611-3 du CESEDA.


3. DELAI DE DEPART VOLONTAIRE - RESSORTISSANTS COMMUNAUTAIRES

L’OQTF avec délai de départ volontaire :
Article L612-1 du CESEDA :« L’étranger faisant l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d’un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision.
L’autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s’il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas.
Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s’il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L’étranger est informé par écrit de cette prolongation.
 »

Article L612-5 du CESEDA : « L’autorité administrative peut mettre fin au délai de départ volontaire accordé en application de l’article L. 612-1 si un motif de refus de ce délai apparaît postérieurement à la notification de la décision relative à ce délai.  »

L’OQTF sans délai :
Article L612-2 du CESEDA : « Par dérogation à l’article L. 612-1, l’autorité administrative peut refuser d’accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :
1° Le comportement de l’étranger constitue une menace pour l’ordre public ;
2° L’étranger s’est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;
3° Il existe un risque que l’étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l’objet.
 »

Article L612-3 du CESEDA : « Le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
2° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
3° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;
6° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;
7° L’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document ;
8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.
 »

L’OQTF applicable aux étranger·es communautaires

Article L251-1 du CESEDA : « L’autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger les étrangers dont la situation est régie par le présent livre, à quitter le territoire français lorsqu’elle constate les situations suivantes :
1° Ils ne justifient plus d’aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 232-1, L. 233-1, L. 233-2 ou L. 233-3 ;
2° Leur comportement personnel constitue, du point de vue de l’ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l’encontre d’un intérêt fondamental de la société ;
3° Leur séjour est constitutif d’un abus de droit.
Constitue un abus de droit le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies, ainsi que le séjour en France dans le but essentiel de bénéficier du système d’assistance sociale.
L’autorité administrative compétente tient compte de l’ensemble des circonstances relatives à leur situation, notamment la durée du séjour des intéressés en France, leur âge, leur état de santé, leur situation familiale et économique, leur intégration sociale et culturelle en France, et l’intensité des liens avec leur pays d’origine.
 »

L’exécution d’office

  • Article L722-3 du CESEDA : « L’autorité administrative peut engager la procédure d’exécution d’office de la décision portant obligation de quitter le territoire français dès l’expiration du délai de départ volontaire ou, si aucun délai n’a été accordé, dès la notification de l’obligation de quitter le territoire français ou, s’il a été mis fin au délai accordé, dès la notification de la décision d’interruption du délai. »

A contrario, cela signifie que l’exécution de l’OQTF ne peut intervenir avant l’expiration du délai de départ volontaire, ou si aucun délai n’est accordé, avant la notification de l’OQTF.

  • Article L722-7 du CESEDA : «  L’éloignement effectif de l’étranger faisant l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut intervenir avant l’expiration du délai ouvert pour contester, devant le tribunal administratif, cette décision et la décision fixant le pays de renvoi qui l’accompagne, ni avant que ce même tribunal n’ait statué sur ces décisions s’il a été saisi.
    Lorsque la décision fixant le pays de renvoi est notifiée postérieurement à la décision portant obligation de quitter le territoire français, l’éloignement effectif ne peut non plus intervenir avant l’expiration du délai ouvert pour contester cette décision, ni avant que le tribunal administratif n’ait statué sur ce recours s’il a été saisi.
    Les dispositions du présent article s’appliquent sans préjudice des possibilités d’assignation à résidence et de placement en rétention prévues au présent livre. »

    Le recours est donc suspensif.


4. LA MESURE D’INTERDICTION DE RETOUR SUR LE TERRITOIRE FRANÇAIS (IRTF) :

L’autorité administrative peut, dans certaines circonstances, assortir l’OQTF d’une interdiction de retour sur le territoire français.

Circonstances entraînant une interdiction de retour sur le territoire français et durée de la mesure :

1. IRTF automatique :

En l’absence de délai de départ volontaire / en cas de maintien irrégulier sur le territoire à l’expiration du délai de départ volontaire.

Article L612-6 du CESEDA : «  Lorsqu’aucun délai de départ volontaire n’a été accordé à l’étranger, l’autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d’une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l’autorité administrative n’édicte pas d’interdiction de retour.
Les effets de cette interdiction cessent à l’expiration d’une durée, fixée par l’autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l’exécution de l’obligation de quitter le territoire français.  »

Article L612-7 du CESEDA : « Lorsque l’étranger s’est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l’autorité administrative édicte une interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l’autorité administrative n’édicte pas d’interdiction de retour.
Les effets de cette interdiction cessent à l’expiration d’une durée, fixée par l’autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l’exécution de l’obligation de quitter le territoire français.
 »

PRECISION : « Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l’autorité administrative tient compte de la durée de présence de l’étranger sur le territoire français, de la nature et de l’ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu’il a déjà fait l’objet ou non d’une mesure d’éloignement et de la menace pour l’ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (…).  » (Article L612-10 CESEDA).

2. IRTF facultative :

L’autorité administrative peut décider d’assortir l’OQTF d’une IRTF dans les autres cas de figure.

Article L612-8 du CESEDA : «  Lorsque l’étranger n’est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l’autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d’une interdiction de retour sur le territoire français.
Les effets de cette interdiction cessent à l’expiration d’une durée, fixée par l’autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l’exécution de l’obligation de quitter le territoire français.  »

PRECISION : Concernant l’édiction et la durée de l’interdiction de retour mentionnée à l’article L. 612-8, « l’autorité administrative tient compte de la durée de présence de l’étranger sur le territoire français, de la nature et de l’ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu’il a déjà fait l’objet ou non d’une mesure d’éloignement et de la menace pour l’ordre public que représente sa présence sur le territoire français.  » (art. L612-10 du CESEDA).

3. IRTF impossible :
Article L612-9 du CESEDA : « Sauf s’il n’a pas satisfait à une précédente décision portant obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l’ordre public, les articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ne sont pas applicables à l’étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application des articles L. 425-1 ou L. 425-3 [titres de séjours destinés aux victimes de TEH] n’a pas été renouvelé ou a été retiré ou que, titulaire d’un titre de séjour délivré sur le même fondement dans un autre Etat membre de l’Union européenne, il n’a pas rejoint le territoire de cet État à l’expiration de son droit de circulation sur le territoire français dans le délai qui lui a, le cas échéant, été imparti.  »

À noter : L’IRTF entraine une inscription au fichier SIS. Le Système d’Information Schengen (SIS) est une base de données commune permettant aux autorités de chaque État membre de disposer, grâce à une procédure d’interrogation automatisée, de signalements sur des personnes ou des objets.
Ce signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen entraîne l’impossibilité pour l’étranger·e de pénétrer sur le territoire d’un des États membres.
Pour plus d’information sur le SIS voir ici


RECOURS CONTRE LES MESURES D’ELOIGNEMENT

La décision de la préfecture refusant au demandeur l’octroi d’un titre de séjour (ou son renouvellement) assortie d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (et éventuellement d’une interdiction de retour sur le territoire français) peut faire l’objet de recours (gracieux et/ou contentieux).
Le recours gracieux consiste en une lettre recommandée avec accusé de réception adressée directement à l’autorité qui a pris la décision de refus de délivrance d’un titre de séjour assortie d’une OQTF - le Préfet - ou à son supérieur hiérarchique (recours hiérarchique) - le Ministre de l’Intérieur - demandant l’annulation de cette décision.

    • Les recours gracieux en matière de refus de délivrance de titre de séjour ne suspendent pas le délai de recours contentieux (Cf. infra) ni ne suspendent l’exécution de la mesure d’éloignement (absence d’effet suspensif des recours gracieux en matière de refus de délivrance de titre de séjour).
    • Le courrier envoyé doit :
      • signaler s’il s’agit d’un recours gracieux (Préfet) ou hiérarchique (Ministre de l’Intérieur) ;
      • faire mention de la décision contestée. Une copie de la décision contestée doit être jointe au courrier ;
      • expliciter les raisons (de droit et de fait) pour lesquelles le demandeur conteste le refus de délivrance de titre de séjour et l’Obligation de Quitter le Territoire Français assortie à cette décision (motivation du recours) et en demande l’annulation. À cette fin, toutes les pièces utiles à cette contestation devront être jointes au courrier.

Le recours contentieux consiste en une requête en annulation de la décision de refus de délivrance (ou de renouvellement) d’un titre de séjour assortie d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (donc fondée sur le 3° de l’art. L611-1 du CESEDA) adressée au tribunal administratif territorialement compétent.

    • Le recours contentieux doit être effectué dans un délai de 30 jours suivant la notification de la décision de refus de délivrance d’un titre de séjour si cette dernière est assortie d’une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire (art. L614-4 du CESEDA) ou dans un délai de 48 heures s’il s’agit d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ (art. L614-6 du CESEDA).
    • ATTENTION : lorsque l’OQTF est notifiée avec une décision d’assignation à résidence ou de placement en rétention, le TA peut être saisi dans un délai de 48 heures suivant la notification de ces mesures (art L614-8 CESEDA).
    • Le dépôt au tribunal administratif d’un recours contentieux suspend l’exécution de l’obligation de quitter le territoire français. Aucune mesure d’éloignement ne pourra donc être opérée avant que le tribunal administratif ne se soit prononcé sur le recours contre le refus de délivrance d’un titre de séjour.
    • La présence d’un·e avocat·e n’est pas obligatoire mais est très fortement conseillée. Vous pouvez demander au tribunal qu’il vous en soit désigné·e un·e d’office.
    • La requête en demande d’annulation d’une décision de refus de délivrance d’un titre de séjour assortie d’une Obligation de Quitter le Territoire Français doit :
      • établir clairement qu’il s’agit d’une requête en vue de l’annulation d’une décision de refus de délivrance d’un titre de séjour assortie d’une Obligation de Quitter le Territoire Français.
      • faire mention de la décision contestée. Une copie de la décision contestée doit être jointe à la requête.
      • expliciter les raisons (de droit et de fait) pour lesquelles le demandeur conteste le refus de délivrance de titre de séjour et l’Obligation de Quitter le Territoire Français assortie à cette décision (motivation du recours) et en demande l’annulation. À cette fin, toutes les pièces utiles à cette contestation devront être jointes à la requête en annulation.

ATTENTION : Concernant la procédure contentieuse pour les OQTF non fondées sur un refus de titre de séjour, voir les articles L614-1 à L614-19 du CESEDA.

ATTENTION : concernant les décisions d’éloignement, des dispositions particulières sont applicables à l’Outre-mer (art. L651-1 à L656-2 du CESEDA).

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