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« Le département de Mayotte fête ses 10 ans : la réalité a-t-elle douché les espoirs ? »

Publié le 30-03-2021

Source : La 1ere – France TV Info

Auteure : Angélique Le Bouter

Extraits :

« La France fête les 10 ans de la départementalisation de Mayotte. Revendication de longue date pour mieux ancrer le territoire de l’océan Indien dans la République française, elle était la promesse de changements de la structure sociale et sociétale de l’archipel. Quel bilan après 10 ans ? Les progrès attendus ont-ils eu lieu ? Les craintes partagées alors se sont-elles transformées en problèmes ? Pour éclairer ces questions, Outre-mer la1ère s’est penchée sur plusieurs aspects de la société mahoraise : la population, la scolarisation, l’emploi et le niveau de vie. Des progrès, des reculs, des retards… La preuve par les chiffres.

Population : 256 000 habitants, 48% d’étrangers
Mayotte est un département jeune par son statut, mais aussi par sa population : 23 ans en moyenne en 2017, contre 41 ans dans l’Hexagone, 35 ans à La Réunion - l’autre département français de l’océan Indien - et 28 ans en Guyane. Le début des années 2010 et la départementalisation ont coïncidé avec plusieurs évolutions notables en termes de démographie, pas forcément celles attendues par les Mahorais.

Le Défenseur des droits évaluaient à 30 000 le nombre d’étrangers qui résidaient à Mayotte en situation irrégulière en 2017 – soit 11,7% de la population totale, alors que le nombre de mineurs non accompagnés s’élevait à environ 4 000. Bien que dépourvues de titres de séjour, nombre de ces personnes ont elles aussi des droits en matière d’éducation, de santé, de sécurité.

Une politique d’expulsions évolutive
Le nombre d’éloignements des étrangers augmente jusqu’en 2010, date de la départementalisation. Au cours des huit années suivantes, les reconduites à la frontière tendent à diminuer progressivement, à l’exception d’un rebond en 2014.

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Un niveau de vie six fois plus faible que dans l’Hexagone
Les trois quarts de la population de Mayotte vit sous le seuil de pauvreté national, soit plus de 200 000 personnes dont 110 000 mineurs. C’est en légère baisse par rapport à 2011 (84%). Les personnes originaires de l’étranger sont aussi particulièrement exposées à la pauvreté. Ainsi, le taux de pauvreté atteint 94 % lorsque la personne de référence du ménage est née à l’étranger. En effet, le plus souvent, les personnes venant de l’étranger résidant à Mayotte disposent de faibles revenus et ne perçoivent pas de prestations sociales.

Le statut de département n’a pas tout résolu. Le niveau de vie médian des habitants de Mayotte est six fois plus faible que celui de l’Hexagone et en baisse, lui, par rapport à 2011. Bien que très faible, les revenus avaient pourtant quasiment été multipliés par deux entre 1995 et 2005. Le revenu annuel moyen mahorais, calculé par ménage, était évalué en 2005 à 9.337 euros, alors qu’il s’élevait à 29.696 euros dans l’Hexagone. En 2011, la moitié de la population mahoraise déclarait disposer de moins de 384 euros par mois. Ce revenu médian diminue ensuite : en 2017, la moitié de la population de Mayotte vit avec moins de 260 euros par mois.

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  • Scolarisation : peut encore mieux faire

A Mayotte, moins d’une personne en âge de travailler sur trois a un emploi, c’est deux fois moins qu’au niveau national (66%). Mais à niveau de diplôme équivalent, en dépit d’un marché du travail plus restreint, les habitants de Mayotte ont autant de chances d’avoir un emploi que les habitants de l’Hexagone. L’absence de formation est donc également un facteur qui pèse sur le marché du travail.

Le niveau de formation s’améliore
L’accès a l’emploi est rendu difficile par le faible niveau de qualification des Mahorais. En 2018, seules 27% des personnes de 15 ans ou plus sorties du système scolaire possèdent un diplôme, contre 72% dans l’Hexagone. Cependant la situation s’améliore dans le 101e département : en 2009, seuls 18% des 15 ans et plus étaient diplômés (graphique de gauche). D’une manière générale, la part des diplômés progresse depuis 2009, mais cette hausse est atténuée par l’arrivée plus importante ces dernières années de natifs de l’étranger, notamment des Comores.

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L’île manque de classes et d’établissements
L’école pour tous est l’un des plus grands défis du rectorat de Mayotte. Si la scolarisation s’est nettement améliorée depuis les années 1970, des problèmes subsistent, même 10 ans après la départementalisation. Le nombre insuffisant de salles de classe a pour conséquence la persistence d’un système de rotation : une même salle est utilisée par deux classes, l’une l’occupant le matin et l’autre l’après-midi. Depuis 2007, les effectifs scolarisés augmentent chaque année de 2 000 à 4 000 élèves. De 2007 à 2017, les établissements scolaires de Mayotte ont vu leur population croître d’environ 40 %, explique un rapport de l’Assemblée nationale de décembre 2018, passant de 70 000 à 105 000 élèves : "On estime que le nombre de salles de classes manquantes dans l’enseignement primaire s’élevait à 346 en 2017."

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D’après l’INSEE, en 2017 "à Mayotte, environ 5 400 enfants mineurs vivent dans un logement, mais sans leurs parents (...) La moitié d’entre eux ne sont pas inscrits dans un établissement scolaire, alors que 61 % ont entre 6 et 16 ans. Près de la moitié (44 %) sont de nationalité française." Or, depuis la rentrée scolaire 2019, l’instruction est obligatoire dès l’âge de 3 ans, c’était le souhait d’Emmanuel Macron. A la rentrée 2019 à Mayotte, il y avait selon Gilles Halbout le vice-recteur de l’île cité par le Syndicat national des instituteurs (SNUipp), 4 524 élèves de trois ans inscrits. Or, depuis 2015, le nombre de naissances à la maternité de Mayotte s’établit chaque année autour de 10 000. Le compte n’y est donc pas.

En 2018, 52 083 élèves étaient scolarisés dans le premier degré à Mayotte, selon le vice-rectorat. À Mamoudzou et Koungou, les deux communes les plus peuplées de l’île, il manque, explique le vice-recteur, 1 300 places en maternelle et primaire. Mais ces chiffres cachent une autre réalité : le système de rotations adopté par 40% des écoles de l’île. Pour y remédier, lors d’une visite sur l’île en octobre 2019, le président de la République promettait l’ouverture de 800 classes et la fin des rotations "en 2025 au plus tard". Le manque d’infrastructures scolaires est pointé du doigt depuis de nombreuses années dans l’archipel, sans solution jusqu’ici : en 2004 déjà, le maire de Mamoudzou espérait la fin des rotations "sous trois ans". Huit ans plus tard, François Hollande promettait la création de 100 classes par an pendant son quinquennat (2012 - 2017), soit 500 classes au total. Seules 120 ont été construites, a comptabilisé le SNUipp.

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Voir en ligne : https://la1ere.francetvinfo.fr/long...