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Le défenseur des enfants saisi en Haute-Garonne pour des dizaines de dossiers

Publié le 6-12-2022

Date de la publication : 06/12/2022
Source : France Bleu Occitanie
Autrice : Pascale DANYEL

« Sur 3000 à 3500 dossiers reçus chaque année en France par le défenseur des enfants, plusieurs dizaines proviennent de Haute-Garonne. Eric Delemar répond aux questions de France Bleu Occitanie.

Le choix de France Bleu Occitanie ce 6 décembre, c’est d’inviter le défenseur des enfants qui est l’adjoint de la Défenseur des droits. Il répond aux questions que vous vous posez.

Bonjour Eric Delemar. Bonjour et merci d’être avec nous. Ce matin, vous êtes à Toulouse parce que vous intervenez sur un colloque à l’Espace Vanel sur L’enfant face aux violences conjugales. On va y revenir d’abord. Expliquez nous. C’est quoi très concrètement votre job ?

Mon travail consiste à protéger et à défendre les droits des enfants et à promouvoir leurs droits au regard bien entendu du droit interne, mais surtout de la Convention internationale des droits de l’enfant. C’est à dire des engagements de la France. Et cette convention s’applique et oblige la France à la traduire concrètement. Donc, c’est le droit d’être protégé contre toutes les formes de violences, le droit d’aller à l’école, le droit à la santé, le droit de vivre en famille.

Et ça veut dire que pour les auditeurs qui nous écoutent, et par exemple qui auraient des soupçons de maltraitance sur un enfant qu’ils connaîtraient, ils peuvent vous saisir, comment doivent-ils s’y prendre ?

Notre mission consiste à intervenir lorsque les services publics, les services habilités, n’ont pas su, pu remplir leur mission par manque de diligence, par manque de connaissance du droit, c’est à dire que un enfant n’est pas protégé, alors que par exemple, les services sociaux étaient informés mais n’ont pas pu ou n’ont pas su intervenir en temps et en heure. C’est par exemple les enfants en situation de handicap qui n’ont pas accès au droit fondamental à l’éducation, alors des parents nous saisissent, des associations nous saisissent pour faire valoir ce droit constitutionnel.

Mais c’est plutôt un dernier recours ?

C’est un deuxième recours. Tous nos concitoyens, toutes les personnes, les enfants eux-mêmes peuvent nous saisir. C’est gratuit, par téléphone (le numéro est le 0969390000, du lundi au vendredi, de 8h à 20h), par internet, même par voie postale, sans mettre de timbre (à l’adresse : Défenseur des droits, libre réponse 71120, 75342 Paris cedex 07).
Sachez que le 119 est le numéro d’urgence que tout enfant, toute famille peut appeler. Il n’est pas traçable. Ce qui garantit aussi pour les enfants que ces parents ne voient pas ce numéro sur les traces des factures téléphoniques, si ce sont les parents qui sont auteurs.

Des enfants peuvent vous appeler à vous aussi pour vous saisir ?

Bien sûr, ils peuvent nous saisir lorsque leurs droits fondamentaux ne sont pas encore une fois exercés par ceux qui sont censés le faire.

Et combien le font chaque année ?

Nous recevons environ 3.000, 3.500 saisines par an. 10% sont des enfants, mais ce n’est pas suffisant parce qu’effectivement on observe que les enfants sont éminemment dépendants des adultes pour nous saisir. Et malheureusement, les institutions qui, par méconnaissance ou par manque de diligence, ne vont pas respecter les droits des enfants, elles ne vont pas dire à l’enfant "tu peux saisir le défenseur". C’est souvent des associations, des parents, des avocats, des personnels de santé et des travailleurs sociaux qui vont inviter l’enfant, sa famille, à nous saisir.

Est-ce-que vous savez combien de dossiers chaque année concernent la Haute-Garonne ?

On a plusieurs dizaines de situations de la Haute-Garonne, c’est encore une fois principalement le non-accès à l’éducation. C’est le manque de d’AESH (accompagnant d’élève en situation de handicap, ndlr). Ce sont des familles qui, dans un état de grande tristesse, nous appellent en disant : "Ecoutez, moi mon fils, le 2 septembre, il ne s’est pas levé pour déjeuner avec ses frères et sœurs parce que lui, il n’a pas école, parce qu’on nous informait que l’AESH qu’on nous avait annoncé fin juin, n’est pas nommé."

Est ce que vous avez été saisi du dossier des jeunes migrants isolés qui ont été délogés d’un squat et qui ont campé sur les allées Jules-Guesde à Toulouse ?

Nous sommes saisis régulièrement en France. Sur les trois dernières années, nous avons été saisis concernant 60 départements pour des atteintes aux droits des mineurs non accompagnés. Je ne peux pas me prononcer sur les instructions que nous avons en cours
La Première ministre présente cet après-midi devant des députés le projet de loi immigration, il y a un flou juridique. Souvent l’aide sociale à l’enfance dit "vous n’êtes pas mineurs, donc vous devez rentrer chez vous" et eux fond des recours, entre temps, ils sont à la rue.

Qu’est ce qu’il faut faire selon vous pour ces jeunes ?

Ecoutez, j’invite tous nos concitoyens, mais aussi tous les professionnels de l’éducation spécialisés, du soin, à aller regarder le rapport que avec la défenseure nous avons rédigé l’année dernière. Sur dix ans de jurisprudence, d’atteintes aux droits des mineurs non accompagnés, de la non mise à l’abri pendant l’évaluation de la suspicion des jeunes qui sont, à chaque étape de leur parcours, toujours considérés comme des étrangers avant d’être considérés comme des mineurs. Donc c’est de l’absence de protection, ce sont des difficultés d’accès à l’éducation, à la santé. Ce sont des jeunes qui effectivement sont à la rue et aucun mineur ne devrait vivre à la rue.

Vous venez pour ce colloque public aujourd’hui à Toulouse. L’enfant face aux violences conjugales. L’idée, c’est quoi ? C’est de dire qu’on parle peut être de plus en plus des femmes victimes, mais qu’on oublie peut être un peu les enfants ?

La loi a récemment reconnu l’enfant témoin comme un enfant victime à part entière, c’est à dire que c’est constitutif d’une circonstance aggravante pour l’auteur des faits. Mais bien entendu, je suis là pour évoquer toutes les violences faites aux enfants, mais aussi les violences éducatives ordinaires. Ce que nous avons avec la défenseur traité dans notre rapport annuel que nous avons remis au président de la République le 20 novembre dernier, sur le droit à la vie privée des enfants. Comment effectivement on respecte la chambre, la salle de bain, comment on protège les enfants sur le numérique, tous ces aspects de la vie privée qui font que beaucoup d’enfants sont victimes de violences éducatives. »

Voir l’article en ligne : www.francebleu.fr