CEDH, requête n°14356/19 relative à l’art. 39 du règlement de la Cour (mesures provisoires) et au droit à un recours effectif introduite le 15 mars 2019, communiquée le 28 mars 2019, affaire S.M.K. c. FRANCE concernant la prise en charge d’une mineure isolée non reconnue mineure par le CD, en recours

CEDH, affaire S.M.K. c. FRANCE :

Date : requête n°14356/19 introduite le 15 mars 2019, communiquée le 28 mars 2019

Extraits :

«  EXPOSÉ DES FAITS

1. La requérante est une ressortissante camerounaise affirmant être née en 2002 et résidant à Angers. Le juge de permanence ayant statué sur la demande de mesure provisoire formée par la requérante a décidé d’office que l’identité de cette dernière ne serait pas révélée (article 47 § 4 du règlement). La requérante est représentée devant la Cour par Me A. Le Roy, avocat exerçant à Nantes, ainsi que par Me P. Spinosi, avocat exerçant à Paris.

2. Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par la requérante, peuvent se résumer comme suit.

3. La requérante quitta son pays pour échapper à un mariage forcé. Elle entra en France au mois d’août 2018, et se présenta immédiatement comme étant mineure isolée au service de l’aide sociale à l’enfance du département du Maine-et-Loire (« le département ») afin de solliciter une mesure de protection de la part de ce dernier.

4. La requérante fut hébergée dans un hôtel pendant un mois environ, jusqu’à ce que, le 25 septembre 2018, sur la base d’un entretien avec un éducateur, elle soit considérée comme majeure.

5. Le 26 septembre 2018, le procureur de la République estima qu’il n’y avait pas lieu d’ordonner le placement provisoire de la requérante.

6. La requérante, mise à la rue, n’eut d’autre choix que de dormir dans un squat pendant plusieurs mois. Ses demandes d’hébergement d’urgence furent rejetées au motif qu’elle affirmait être mineure.

7. Aidée par une association, elle obtint d’un membre de sa famille résidant au Cameroun plusieurs documents démontrant selon elle sa minorité.

8. Le 25 octobre 2018, à la suite d’un refus du département de réexaminer sa situation à la lumière de ces nouveaux documents, la requérante saisit le juge des enfants du tribunal de grande instance d’Angers d’une demande de protection fondée sur les articles 375 et suivants du code civil. La requérante sollicita des mesures provisoires en sa faveur jusqu’à ce que le tribunal statue, sur le fondement de l’article 375-5 du code civil. Cette demande de mesure provisoire resta sans réponse jusqu’au 27 mars 2019 (voir ci-après).

9. Parallèlement, le 21 janvier 2019, la requérante saisit le juge des référés du tribunal administratif de Nantes d’une demande tendant à ce que soit assuré son hébergement. Le 24 janvier 2019, le juge des référés fit droit à sa demande, constatant notamment que rien n’indiquait que les pièces fournies par la requérante pour prouver sa minorité seraient falsifiées, irrégulières ou que les faits qui y étaient déclarés ne correspondraient pas à la réalité. En application de cette ordonnance, la requérante fut logée dans un hôtel entre la fin du mois de janvier et le 26 mars 2019.

10. Le 13 mars 2019, sur appel du département, le Conseil d’État annula cette ordonnance, estimant qu’aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale n’était établie s’agissant d’une demande de mise à l’abri dans l’attente de la décision du juge des enfants.

11. Le 15 mars 2019, la requérante saisit la Cour d’une demande de mesure provisoire, sur le fondement de l’article 39 de son règlement, tendant à ce que soit assuré son hébergement. Le même jour, la Cour accepta cette demande, et enjoignit au Gouvernement français d’assurer l’hébergement de la requérante jusqu’au 29 mars 2019.

12. Le 26 mars 2019, la requérante fut invitée à quitter l’hôtel dans lequel elle résidait depuis deux mois. Le soir même, elle fut toutefois prise en charge par la Préfecture du Maine et Loire au titre de l’hébergement d’urgence.

13. Le 27 mars 2019, le juge des enfants près le Tribunal de grande instance d’Angers ordonna avant dire droit l’examen technique approfondi des pièces fournies par la requérante et démontrant selon cette dernière sa minorité. Le juge des enfants confia à titre provisoire la requérante au département, jusqu’au 30 mai 2019.

14. Le 28 mars 2019, la Cour décida de ne pas prolonger l’application de la mesure provisoire.

15. La requérante est depuis le 27 mars 2019 prise en charge par le département.

GRIEFS

16. Invoquant les articles 3 et 8 de la Convention, la requérante se plaint d’avoir été contrainte de vivre dans des conditions d’extrême précarité entre fin septembre 2018 et fin janvier 2019.

17. Invoquant l’article 6 § 1 et l’article 13 combiné à l’article 3 de la Convention, la requérante se plaint de ne pas avoir disposé d’un recours interne effectif au travers duquel elle aurait pu formuler son grief de méconnaissance de l’article 3 de la Convention.

18. Invoquant l’article 34 de la Convention, la requérante se plaint du fait que son hébergement ait été interrompu le 26 mars 2019, ce qui l’a plongée dans un état d’anxiété et d’incertitude jusqu’à ce que son hébergement soit de nouveau assuré plus tard le même jour.

QUESTIONS AUX PARTIES

1. Les conditions de vie de la requérante, entre septembre 2018 et janvier 2019, ont-elles violé l’article 3 et/ou l’article 8 de la Convention ?

2. La requérante avait-elle à sa disposition, comme l’exigent les articles 6 et 13 de la Convention, un recours interne effectif au travers duquel elle aurait pu formuler son grief de méconnaissance de l’article 3 de la Convention ?

3. La mesure provisoire indiquée par la Cour en vertu de l’article 39 de son règlement a-t-elle été respectée, ou y a-t-il eu violation des obligations incombant en l’espèce à l’État au regard de l’article 34 de la Convention ?  »

Décision à retrouver ici.

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Tierce intervention du GISTI du 25 juillet 2019 dans l’affaire S. M. K. contre la France :

Tierce_intervention_GISTI
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