InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Documentation > Avis et recommandations > Nationaux > Défenseure des droits > Décision 2023-107 du 2 mai 2023 relative à des observations présentées devant (...)

Décision 2023-107 du 2 mai 2023 relative à des observations présentées devant une cour administrative d’appel, suite à l’appel interjeté par la préfecture à l’encontre d’un jugement annulant les arrêtés préfectoraux de placement et de maintien en rétention administrative d’une personne se déclarant mineure non accompagnée et présentant des indicateurs de traite des êtres humains

Publié le lundi 21 août 2023 , mis à jour le lundi 21 août 2023

Source : Défenseur des droits

Résumé :

« Le tribunal administratif a annulé les décisions préfectorales estimant qu’au vu des conditions d’interpellation, des éléments recueillis par les services de police et des éléments connus et documentés relatifs à la question des mineurs non accompagnés vietnamiens et des réseaux de traite de ressortissants vietnamiens dans la région des Hauts-de-France, les services de police disposaient d’éléments suffisamment établis permettant de considérer que la requérante était victime d’une des infractions constitutives de la traite des êtres humains. Dès lors, selon le tribunal, les services de police auraient dû, lors de l’audition, informer l’intéressée de ses droits. Ce vice de procédure était, par suite, de nature à entacher d’illégalité les arrêtés du préfet emportant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, la décision de placement en rétention et celle maintenant la requérante en rétention.

Suite à l’appel interjeté par la préfecture, la Défenseure des droits a réitéré ses observations présentées devant le tribunal administratif.

Elle a rappelé que la lutte contre la traite des êtres humains, la répression des infractions liées à celle-ci et la protection des victimes sont encadrées au niveau international, européen et national et que le point central de l’ensemble de ces textes est l’identification des victimes, qu’il s’agisse de l’identification préalable ou de l’identification formelle.

Elle a donc souhaité attirer l’attention de la cour administrative d’appel :
- sur l’absence d’évaluation individuelle de la situation de l’intéressée malgré la présence d’un tableau significatif d’indicateurs de traite des êtres humains, pourtant recueillis dans un cadre manifestement inadapté,
- sur l’absence d’évaluation de la minorité et de l’isolement dans un cadre adapté
- ainsi que sur l’importance du contrôle juridictionnel afin de garantir l’équité de la procédure au regard des obligations de l’Etat en matière de lutte contre la traite des êtres humains. »

Suivi de la décision :

« La cour administrative d’appel a rappelé que les dispositions de l’article R. 425-1 du CESEDA chargent les services de police d’une mission d’information, à titre conservatoire et préalablement à toute qualification pénale, des victimes potentielles de faits de traite des êtres humains. Dès lors, lorsque ces services ont des motifs raisonnables de considérer que le ressortissant étranger pourrait être reconnu victime de tels faits, il leur appartient d’informer ce dernier de ses droits en application de l’article précité.

Suivant les observations du Défenseur des droits, la cour administrative d’appel souligne que, si l’intéressée, interpellée dans une zone d’accès restreint du port de Calais, n’a à aucun moment expressément indiqué aux services de police être victime de traite des êtres humains, compte tenu de sa nationalité et de la notoriété de l’existence de réseaux de traite dans son pays d’origine, de son jeune âge, des contradictions de ses déclarations sur sa date de naissance, de son attitude passive et de son refus d’expliquer pourquoi elle est montée dans le camion dont elle a affirmé ne pas connaître la destination et plus généralement du caractère lacunaire et flou de ses explications, ces éléments auraient dû raisonnablement conduire les services de police à envisager qu’elle soit victime de traite des êtres humains et à lui apporter l’information prévue par le CESEDA.

La cour confirme que ce vice de procédure est de nature à entacher d’illégalité les arrêtés du préfet. »


Voir la décision en ligne : www.juridique.defenseurdesdroits.fr

Voir au format PDF :

Décision 2023-107 du 2 mai 2023

Voir dans le même sens : Défenseur des droits - Décision 2023-106 du 2 mai 2023