InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Documentation > Articles > Léa Jardin, « Noémie Paté, Minorité en errance. L’épreuve de l’évaluation des (...)

Léa Jardin, « Noémie Paté, Minorité en errance. L’épreuve de l’évaluation des mineurs non accompagnés » | Sociétés et jeunesses en difficulté

Publié le jeudi 5 octobre 2023 , mis à jour le jeudi 5 octobre 2023

Léa Jardin, « Noémie Paté, Minorité en errance. L’épreuve de l’évaluation des mineurs non accompagnés », Sociétés et jeunesses en difficulté [En ligne], 29 | Printemps 2023, mis en ligne le 15 septembre 2023, consulté le 05 octobre 2023. URL : http://journals.openedition.org/sejed/12228

Extraits :

« L’ouvrage Minorité en errance est issu de la thèse de doctorat en sociologie de Noémie Paté, intitulée L’accès – ou le non-accès – à la protection des mineur.e.s isolé.e.s en situation de migration : l’évaluation de la minorité et de l’isolement ou la mise à l’épreuve de la crédibilité narrative, comportementale et physique des mineur.e.s isolé.e.s, soutenue le 17 décembre 2018, et pour laquelle elle a reçu le prix de thèse du Défenseur des droits en 2019. Paru en janvier 2023, l’ouvrage condense et actualise les apports de l’enquête de terrain menée par l’autrice, notamment en tant qu’évaluatrice entre 2013 et 2014 pour le Pôle d’évaluation et d’orientation des mineurs isolés étrangers (Peomie) de Créteil, géré par France Terre d’Asile (FTDA). Cette expérience a été complétée par la réalisation de 25 entretiens semi-directifs avec différents acteurs du dispositif protectionnel et l’analyse de documents internes, dont un corpus de 197 rapports d’évaluation, obtenus dans le cadre de sa mission d’évaluation.

Noémie Paté introduit le propos en précisant le contexte particulier dans lequel émerge progressivement la figure du mineur isolé étranger. Dans les années 1970, le contexte politique et social évolue et apparaît une volonté de limitation de l’immigration. La fin du XXe siècle sera marquée, à cet égard, par une "fabrique de l’illégitimité du migrant, et donc de son irrégularité" (p. 14). Les politiques mises en œuvre s’appuient sur la "prétendue dangerosité" des étrangers et le sentiment d’insécurité pour justifier un tri entre les "bons" et les "mauvais" migrants. Une " réduction des catégories “acceptables” " (p. 15) contribue à l’émergence de la catégorie du mineur isolé étranger. L’autrice rappelle ainsi les différents vocables (" jeunes errants", "mineurs demandeurs d’asile", "mineurs étrangers sans-papiers", etc.) qui ont pu être utilisés pour les désigner, jusqu’à la décision, en 2016, du ministère de la Justice de recourir à l’expression "mineurs non accompagnés" (MNA). Selon elle, "la recherche d’une terminologie consensuelle dévoile en effet une difficulté à identifier, à définir, à catégoriser et, en filigrane, elle dévoile les tensions relatives à la responsabilité et à la compétence des différents acteurs concernés" (p. 16).

Et c’est bien de cela que traite l’ouvrage, des multiples paradoxes et contradictions, dus en particulier à la croisée des logiques "antagonistes" (p. 66) du droit de la protection de l’enfance et du droit des étrangers, auxquels sont confrontés quotidiennement les acteurs de cette protection – travailleurs sociaux, magistrats, etc. La protection des mineurs non accompagnés, qui constitue pourtant une obligation internationale au regard de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, ne résiste pas à la logique du tri caractéristique du traitement des publics migrants. Dès lors, l’autrice entend "étudier les pratiques institutionnelles de jugement et d’étiquetage des MNA, à partir d’une étude ethnographique réalisée dans le cadre d’une recherche doctorale" (p. 19). Il est ainsi relevé que, malgré une volonté de rationalisation de ce tri, "les acteurs en charge de ces opérations de classement hésitent, tâtonnent et sont constamment pris dans une tension entre l’impératif de protection des enfants en danger qu’il serait intolérable de ne pas protéger, et celui de la lutte contre “l’appel d’air” et contre la figure annonciatrice de flux supposés massifs et insécurisants" (p. 20).

[...]. »


Voir l’article au format PDF :