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Dans la Marne, obtenir des papiers, la vraie galère pour les jeunes étrangers

Publié le 12-03-2019

Source : L’Union Abonnés

Extraits :

«  La régularisation des jeunes étrangers s’avère de plus en plus compliquée.

Ce que dit la loi

Avant 18 ans, un mineur étranger n’est pas considéré comme étant en situation irrégulière et est pris en charge par l’ASE (Aide social à l’enfance), gérée par le Département.

Une fois passé le cap des 18 ans, il le devient aux yeux de la loi. Il doit alors entreprendre les démarches auprès des services de la préfecture pour obtenir le titre de séjour mention « vie privée et familiale », « étudiant » ou « salarié » / « travailleur temporaire ».

« C’est de plus en plus difficile à vivre pour tout le monde. » Ils se battent depuis des années mais n’ont plus la force. Pour de nombreux bénévoles d’associations dévouées aux sans-papiers dans le Châlonnais, l’espoir de « bouger les choses un tant soit peu », s’est réduit comme peau de chagrin pour laisser place à du découragement. Et un certain fatalisme. « Les bénévoles préfèrent arrêter. C’est trop dur pour eux de se démener et de constater que ça ne sert à rien. Que rien ne change », explique, lasse, Marie-Pierre Barrière, combative et incontournable responsable de l’antenne locale du Réseau éducation sans frontières.

Un triste constat partagé par d’autres associations, qui accompagnent les jeunes étrangers, tout juste majeurs dans leurs démarches de régularisation.

1. « Le prétexte de la fraude documentaire »

Sur la dizaine d’histoires racontées par les bénévoles d’associations, directions de structures d’accompagnement, employeurs, ou jeunes, toutes ont un point commun : il s’agit dans tous les cas d’un papier dont la validité n’est pas reconnue par l’administration et qui ne peut donc être légalisé, bloquant ainsi tout espoir d’obtenir la régularisation d’une situation. (...)

“Ce sont des mois, des années d’attente, de rendez-vous, de papiers envoyés. Et pendant ce temps, ces jeunes n’ont aucun avenir”

D’autant que, de fait, le dilemme est sans fin. « On en est à 19 dossiers bloqués depuis 18 mois au niveau de la préfecture de la Marne. Ce sont des mois, si ce n’est des années d’attente, de rendez-vous, de papiers envoyés. Et pendant ce temps, ces jeunes n’ont aucun avenir. Les consulats français dans les pays font le travail bien souvent mais ça ne convient jamais. » Lorsqu’un premier document a été refusé, c’est bien souvent un branle-bas de combat qui redémarre. Les familles encore au pays sont contactées et les consulats missionnés. (...)

2. Des tests osseux parfois contestés

(...) S’ensuivent après des tests osseux chargés, quant à eux, d’apporter la preuve scientifique d’une minorité ou d’une majorité. Troisième et dernière étape : l’expertise des documents d’identité, autrefois prise en charge par l’ASE, aujourd’hui du ressort de la préfecture.

Si le dernier point présente, sans grande surprise, des difficultés, les tests osseux s’avèrent, aux seuls dires de RESF, eux aussi litigieux. « Il est arrivé que la préfecture aille jusqu’à contester ces tests. C’est invraisemblable », ajoute Marie-Pierre Barrière. Dans quelques (rares) cas, des premiers tests effectués dans un autre département auraient été refaits dans la Marne pour aboutir à une conclusion inverse. « Un jeune peut avoir été déclaré mineur dans un département et majeur ici. C’est invraisemblable. »

3. Une méthode qui ne passe pas

« Irrespectueuse », « méprisante », « hors-la-loi »… Salariés et bénévoles ne mâchent pas leurs mots quant il s’agit de décrire les us et coutumes de la préfecture. « Les conditions de refus ne sont pas toujours motivées. Les agents expliquent en cinq minutes au guichet qu’il existe un « doute véritable » et tout le monde en reste là, jusqu’à la prochaine fois », explique un directeur de structure d’accueil. « Cela fait plusieurs années que cela se complique mais depuis septembre 2018, on observe un blocage de la préfecture sous prétexte de “fraude documentaire” », détaille Ibtissam Bouchaara.

Face à cette méthode « contestée et contestable », RESF a depuis peu décidé de s’y prendre autrement et de s’en remettre aux mains de la justice. « Un refus doit être motivé par écrit. Quand ce n’est pas le cas, nous pouvons attaquer au contentieux administratif, détaille Ibtissam Bouchaara. La préfecture a dès lors deux mois pour répondre. Qu’il y ait une réponse ou non, nous pouvons contester la décision. » Pour quels résultats ? Difficile à dire pour l’instant.

Le reste du tissu associatif se montre bien plus prudent et mesuré au moment d’évoquer les manières de procéder de la préfecture. Bien que plusieurs membres d’associations ne parviennent pas à comprendre « l’intérêt politique qu’il y a là-dedans [dans le durcissement de la préfecture] » dans un département comme la Marne, certains estiment « ne pas avoir tous les éléments en main pour comprendre un tel comportement ». « Malheureusement, je ne pense pas que cela va aller en s’arrangeant, confie ce Châlonnais, investi de longue date dans l’accompagnement des jeunes mineurs isolés. Une fois leur majorité atteinte, ces gamins n’ont guère de perspectives heureuses ici. (...)  »

Voir en ligne : http://abonne.lunion.fr/id49078/art...