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« Qui peut affronter la vie seul à 18 ans ? »

Publié le 13-10-2019

Source : Libération

Auteur : Anaïs Moran

Extraits :

«  Alors qu’une « stratégie nationale » est en projet pour repenser ce secteur sinistré, « Libération » est allé à la rencontre des premiers concernés. Cette semaine d’anciens jeunes de l’Aide sociale à l’enfance.

Dix mois qu’ils l’attendaient. Après moult reports, la réforme de la protection de l’enfance, réclamée par les professionnels du secteur comme les observateurs, est présentée ce lundi. Promise par le secrétaire d’Etat Adrien Taquet lors de sa prise de fonction en janvier, cette « stratégie nationale de prévention et de protection » est attendue avec une forte dose de scepticisme au vu des mesurettes annoncées jusqu’ici.

Une stratégie digne de ce nom aurait pourtant le pouvoir d’améliorer le quotidien des 300 000 enfants et adolescents suivis et pris en charge par ce système de protection. Sachant que l’ensemble de ses acteurs, les travailleurs sociaux en première ligne, trop peu nombreux, trop isolés et rarement valorisés, sont au bord de la rupture. Dans ce contexte, le secrétaire d’Etat sera principalement jaugé sur sa détermination (ou non) à rénover en profondeur l’Aide sociale à l’enfance (ASE), pierre angulaire du dispositif de protection de l’enfance.

Maëlle, Stéphanie, Joao, Michaël, Léo et Anne-Solène sont des anciens enfants de l’ASE, ex-tributaires d’un parcours amer ou bienheureux, mais sans conteste ponctué de défaillances institutionnelles. Ils sont désormais membres du collectif Repairs !, un réseau qui vient en aide aux jeunes majeurs à la sortie de l’ASE, et se mobilisent pour transmuer leur vécu en sujet politique.

(...)

« Les mineurs isolés ne sont pas des enfants de seconde zone »

« J’ai quitté seul l’Angola pour la France à l’âge de 14 ans. J’ai été confié à l’ASE à mon arrivée sur le territoire et j’y suis resté jusqu’à ma majorité. J’ai fait partie de ces mineurs qu’on range dans la case des MNA, les mineurs non accompagnés, qui sont souvent connus pour leur invisibilité. Cette case dit pourtant peu de choses sur la dureté de l’exil que nous avons connu et le lot de désolations qui l’accompagne : perte de la famille, disparition des repères qui vous construisent, maltraitances, agressions sexuelles… Tout cela dans l’espoir d’un avenir plus prometteur.

« En France, la situation des MNA nous rappelle que l’application des valeurs républicaines se fait à géométrie variable dans notre pays. Qu’il s’agisse de leur pseudo-prise en charge dans des chambres d’hôtel, de l’absence totale de soutien psychologique alors que ces enfants ont connu le déracinement et, pour certains, la traite des êtres humains, du manque de formation des équipes éducatives pour répondre à leurs besoins spécifiques, de leur ghettoïsation dans des structures "dédiées"… Sans parler du couperet qui tombe à 18 ans et se solde pour beaucoup par un retour à la rue, ou à la frontière.

« Il est urgent de cesser de considérer les mineurs isolés comme des enfants à protéger de seconde zone. Les engagements internationaux signés par la France le demandent. La décence ordinaire et l’humanité minimale le commandent. » (...)  »

Voir en ligne : https://www.liberation.fr/france/20...