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Cour administrative d’appel de Douai 3e chambre - formation à 3, 29 décembre 2017 N° 17DA00825 , Tunisie, Suivi sérieux de la formation, "que son employeur, qui souligne son courage et sa ponctualité souhaite l’embaucher en contrat à durée déterminé pour dix-huit mois à l’issue de son contrat d’apprentissage ; que, dès lors, en lui refusant le titre de séjour demandé et en obligeant M. par la décision contestée, à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, la préfète de la Seine-Maritime a entaché sa décision d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant"

Publié le : mercredi 17 janvier 2018

Source : Cour administrative d’appel de Douai, 3e chambre - formation à 3

Date : Arrêt du 29 décembre 2017 N° 17DA00825

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. a demandé au tribunal administratif de Rouen d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 23 août 2016 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d’office.

Par un jugement n° 1604041 du 28 février 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 mai 2017, M. , représenté par Me , demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du 28 février 2017 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, l’arrêté du 23 août 2016 ;

3°) d’enjoindre, à titre principal, à la préfète de la Seine-Maritime lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un délai d’un mois suivant la notification de l’arrêt à intervenir, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

- l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 ;

- le code du travail ;

- le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- et les observations de Me , représentant M. 

1. Considérant que M. , ressortissant tunisien né le 4 septembre 1997, est entré en France par bateau le 9 avril 2014, sous couvert d’un visa de court séjour ; qu’en tant que mineur isolé étranger, il a été recueilli le 16 mai 2014 par les services de l’aide sociale à l’enfance du département de la Seine-Maritime ; qu’il a sollicité, le 11 septembre 2015 son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile combinées avec les stipulations de l’article 7 de l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et, subsidiairement, sur le fondement des stipulations de l’article 3 de cet accord ; que M. relève appel du jugement du 28 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 23 août 2016 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d’office ;

2. Considérant qu’aux termes des stipulations de l’article 3 de l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail : " Les ressortissants tunisiens désireux d’exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d’un an au minimum, et qui ne relèvent pas de l’article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d’un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention salarié " ;

3. Considérant que M. , se prévaut, en cause d’appel de la méconnaissance des stipulations précitées ; qu’il ressort des pièces du dossier que M. a eu d’excellents bulletins scolaires à l’Institut départemental de l’enfance, de la famille et du handicap pour l’insertion au cours de l’année scolaire 2014-2015, avec les encouragements au 1° et 2° trimestre et les félicitations au 3° trimestre ; que son maitre de stage avec qui il a signé le 1er juin 2015 un contrat d’apprentissage en maçonnerie l’a qualifié de " stagiaire très sociable avec une grande envie d’apprendre le métier de maçon. Stagiaire ponctuel et courageux " ; qu’une autorisation de travail valable du 1er juillet 2015 au 1er juillet 2016 puis du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017 a été délivrée à son employeur par les services de l’unité territoriale de la Seine-Maritime de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi ; que M. suit une formation au centre de formation des apprentis du bâtiment et des travaux publics de Rouen ; que son employeur, qui souligne son courage et sa ponctualité souhaite l’embaucher en contrat à durée déterminé pour dix-huit mois à l’issue de son contrat d’apprentissage ; que, dès lors, en lui refusant le titre de séjour demandé et en obligeant M. par la décision contestée, à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, la préfète de la Seine-Maritime a entaché sa décision d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

4. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que M. est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement du 28 février 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à Me d’une somme de 800 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à la part contributive de l’Etat ;

Sur les conclusions à fin d’injonction ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. " et qu’aux termes de l’article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l’injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d’une astreinte qu’elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d’effet. " ;

6. Considérant que l’annulation, pour le motif susmentionné, de l’arrêté du préfet de la Seine-Maritime, implique seulement que la demande de carte de séjour temporaire de M. soit réexaminée ; qu’ainsi, et sans qu’il soit besoin, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte, il y a lieu d’enjoindre la préfète de la Seine-Maritime de procéder à ce réexamen dans un délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt et dans l’attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

DÉCIDE :

Article 1er : L’arrêté du 23 août 2016 de la préfète de la Seine-Maritime et le jugement du 28 février 2017 du tribunal administratif de Rouen sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de la Seine-Maritime de procéder au réexamen de la demande de carte de séjour temporaire de M. dans le délai d’un mois à compter de la date de notification du présent arrêt, et dans l’attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L’Etat versera à Me une somme de 800 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celle-ci renonce à la part contributive de l’Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. , au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, à la préfète de la Seine-Maritime et à Me