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Cour administrative d’appel de Nancy – 4ème chambre – Arrêt N°21NC02066 du 21 juillet 2022 – Annulation du refus de titre de séjour – Documents d’état civil – Impression au toner – Articles 175, 196, 554 et 555 du code civil guinéen

Publié le : mardi 16 août 2022

Résumé :

La Cour annule la décision de refus de titre de séjour (demande fondée sur l’article L.313-15, désormais L.435-3 du CESEDA – admission exceptionnelle au séjour « salarié » ou « travailleur temporaire ») prise par le préfet. Ce dernier avait fondé sa décision sur le fait que les documents d’état civil de l’intéressé seraient dépourvus de valeur probante au regard du rapport de la PAF. Or, le préfet ne renverse pas la présomption de validité posée par l’article 47 du code civil.

En effet, si le rapport relevait que l’impression était réalisée au toner sur du papier ordinaire, que des informations prévues par les articles 175 et 196 du code civil guinéen étaient manquantes, que le jugement supplétif ne respectait pas les articles 554 et 555 du même code et que l’extrait de naissance était incomplet ; la Cour retient que les signatures présentes sur les documents d’état civil produits ont été légalisées, que les dispositions des articles 175 et 196 du code civil guinéen ne mentionnent pas qu’elles s’appliquent aux jugements supplétifs et que les articles 554 et 555 du même code ne s’appliquent ni aux actes de naissance, ni aux jugements supplétifs. Par ailleurs, le fait que la copie intégrale et l’extrait d’acte de naissance transcrivant ce jugement supplétif ne comportent pas l’ensemble des mentions prévues par les articles 175 et 196 du code civil guinéen ne suffit pas à établir que ces actes seraient irréguliers, falsifiés ou inexacts.

RAPPEL – Présomption de validité des actes d’état civil étrangers

Article 47 du code civil : « Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.  »


Extraits de l’arrêt :

« 4. Pour refuser de délivrer un titre de séjour à M.A sur le fondement des dispositions de l’article L.313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le préfet de Meurthe-et-Moselle s’est fondé sur les circonstances que, selon le rapport technique documentaire […], les documents présentés par M.A pour établir son état civil étaient dépourvus de valeur probante.

[…]

7. Il ressort des pièces du dossier qu’à l’appui de sa demande de titre de séjour, M. A a présenté un jugement supplétif […] du tribunal de première instance de Conakry II […] tenant lieu d’acte de naissance et un extrait du registre de l’état civil […] transcrivant ce jugement supplétif […], ainsi qu’un certificat de nationalité et une carte d’identité consulaire. […].

8. Pour contester l’authenticité des actes d’état civil produits, le rapport d’examen technique documentaire de la police aux frontières a relevé qu’ils présentaient " des caractéristiques fortement défavorables ". Ce rapport observe que le texte et les armoiries sont imprimés au toner sur du papier ordinaire, qu’il manque certaines informations prévues par les articles 175 et 196 du code civil guinée, que le jugement supplétif ne respecte pas les articles 554 et 555 du même code et note enfin, sans plus de précision, que l’extrait d’acte de naissance n’est " pas complet ".

9. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les signatures du chef du greffe et de l’officier d’état civil des documents d’état civil produits par le requérant ont été légalisées par Mme C A, chargée des affaires consulaires au sein de l’ambassade de Guinée en France [...]. Il ne ressort pas des dispositions des articles 175 et 196 du code civil guinéen, qui s’appliquent notamment aux actes de naissance, qu’elles s’appliqueraient aux jugements supplétifs. Par ailleurs, à les supposer en vigueur à la date des actes en cause, les articles 554 et 555 de ce même code ne concernent ni les actes de naissance, ni les jugements supplétifs. Au surplus, la seule circonstance que la copie intégrale et l’extrait de l’acte de naissance de M. A transcrivant ce jugement supplétif ne comportent pas l’ensemble des mentions prévues par les articles 175 et 196 du code civil guinéen ne saurait suffire à établir que ces actes, dont le rapport technique documentaire lui-même indique qu’ils sont revêtus de " tampons humides ne présentant pas d’anomalie flagrante ", seraient irréguliers, falsifiés ou inexacts. Dans ces conditions, le préfet de Meurthe-et-Moselle ne renverse pas la présomption de validité qui s’attache, en vertu notamment de l’article 47 du code civil, aux mentions contenues dans le jugement supplétif […] et l’extrait du registre de l’état civil […]. Par conséquent, c’est par une inexacte appréciation de ces dispositions que le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté la demande de titre de séjour de M. A au motif qu’il ne justifiait pas de son état civil et, en particulier, de sa date de naissance.

[…] ».


Voir l’arrêt au format PDF :

CAA Nancy - N°21NC02066 du 21 juillet 2022