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Cour administrative d’appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, arrêt du 30 janvier 2020 n°19LY01999. MIE ivoirien confié à l’ASE s’est vu refuser la délivrance d’un titre de séjour (TS) assorti d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). La Cour relève que le rapport d’analyse de l’extrait du registre des actes d’état civil, qui ne mentionne pas les points de contrôle explorés, appuie son avis défavorable sur des observations non affirmatives et sans conclure à la fraude ; que si l’attestation d’identité souffre d’une incohérence majeure, l’administration, qui a mené l’examen sur une photocopie sans préciser les points de contrôle, n’a pas conclu à la fraude. ; et que l’avis défavorable relatif au certificat de nationalité a été émis sur une photocopie. Ainsi, en estimant se trouver dispensée de l’obligation de saisir les autorités [consulaires] alors que les documents présentés ne pouvaient être regardés comme étant manifestement frauduleux, la préfète n’établit pas la fraude quant à la détermination de sa minorité lors de sa prise en charge à l’ASE - art. L.111-6 du Ceseda et 47 du code civil. La Cour annule le jugement du tribunal administratif ainsi que l’arrêté de la préfète et enjoint de réexaminer la situation de M. X sous deux mois.

Publié le : jeudi 13 février 2020

Source : Cour administrative d’appel de Lyon

Date : arrêt du 30 janvier 2020 n°19LY01999

Extraits :

« 8. Pour rejeter la demande de M. X, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a relevé, d’une part, que la préfète de l’Allier s’est fondée sur l’analyse à laquelle il a été procédé par les services de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Clermont-Ferrand, dont il ressort l’irrégularité de l’extrait du registre des actes d’état civil et le caractère " douteux " du certificat de nationalité, d’autre part qu’aucune force probante ne pouvait être reconnue au certificat de nationalité, pour en tirer que l’administration renversait la présomption d’authenticité des documents remis par l’intéressé aux fins de justifier de sa minorité au moment de sa prise en charge par l’aide sociale à l’enfance et que le passeport et la carte d’immatriculation consulaire produits à l’instance, établis sur ces bases, ne pouvaient être pris en compte.

9. Toutefois, en s’abstenant tant de vérifier l’état civil allégué par M. X en prenant l’attache des autorités ivoiriennes en application notamment de l’article 1er du décret du 24 décembre 2015 que de soumettre le demandeur à des examens médicaux susceptibles de révéler son âge biologique, la préfète de l’Allier se borne, en s’appropriant les conclusions de l’étude documentaire à la date de la décision en litige, à introduire une incertitude sur la date de naissance de l’appelant, sans remettre en cause par ailleurs les autres éléments de l’identité dont il fait état. Or, en premier lieu, le rapport d’analyse de l’extrait du registre des actes d’état civil, qui ne mentionne pas les points de contrôle explorés, appuie son avis défavorable sur des observations non affirmatives et sans conclure à la fraude. En deuxième lieu, si l’attestation d’identité souffre d’une incohérence majeure, qui n’est pas levée par les pièces du dossier à l’instance, dans sa date d’établissement par rapport à celle du document au vu duquel elle a été rédigée, l’administration, qui a mené l’examen sur une photocopie sans préciser les points de contrôle, n’a pas conclu à la fraude. Enfin, l’avis défavorable sur le certificat de nationalité ivoirienne, laquelle n’est pas remise en cause, a été également émis sur une photocopie. Dans ces conditions, si un doute légitime demeure sur la régularité de l’attestation d’identité, la préfète de l’Allier ne peut opposer à M. X par la seule voie de la présomption de l’avantage qu’il aurait tiré d’une fraude sa majorité légale, qui ne ressort par ailleurs d’aucune pièce du dossier, lors de sa prise en charge par l’aide sociale à l’enfance.

10. Eu égard à cet ensemble d’éléments, en estimant se trouver dispensée de l’obligation de saisir les autorités maliennes, en vue de la vérification des documents d’état civil produits par M. X, alors que les documents présentés par l’intéressé ne pouvaient être regardés comme étant manifestement frauduleux quant à la détermination de sa minorité lors de sa prise en charge par l’aide sociale à l’enfance, la préfète de l’Allier, alors même qu’elle a fait procéder, auprès de la police de l’air et des frontières à des examens techniques des documents produits, n’établit pas la fraude sur ce point, qu’elle a retenue pour motif de sa décision sans demander explicitement à l’instance de substituer un autre motif à ce dernier.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. X est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 12 novembre 2018 par lequel la préfète de l’Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi, et à demander l’annulation de ces décisions. Il y a lieu dès lors d’annuler le jugement attaqué et, pour erreur de droit, la décision de refus de séjour, ainsi que par voie de conséquence les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi.

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

12. L’annulation prononcée ci-dessus n’implique pas la délivrance, à la date à laquelle la cour statue, d’un titre de séjour à l’appelant. Il y a lieu, dans ces conditions, d’enjoindre seulement à la préfète de l’Allier de réexaminer la situation de M. X dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. »

***

Arrêt disponible au format pdf ci-dessous :

CAA_Lyon_30012020_n°19LY01999