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Tribunal administratif de Bordeaux – Ordonnance n°2305910 du 27 octobre 2023 – Référé liberté – Fin d’APU sans qu’il ne soit procédé à l’évaluation de la minorité et de l’isolement – La décision de fin de prise en charge ne peut se fonder sur les seules mentions figurant au fichier Visabio - Le département est enjoint de reprendre l’APU

Publié le : mardi 27 février 2024

Résumé :

Le département de la Gironde a mis fin à l’accueil provisoire d’urgence (APU) de l’intéressée en se fondant sur la seule consultation du fichier Visabio (en application de l’art. R.221-11 du CASF) faisant apparaître une demande de visa sous l’identité d’une personne majeure, et ce sans procéder à un entretien ni à aucune autre modalité d’évaluation de sa situation, alors même au demeurant qu’elle présentait des documents d’identité.

Le juge des référés, se prononçant sur le fondement de l’art. L.521-2 du CJA (« référé liberté »), rappelle que le département ne saurait se fonder sur les seules mentions contradictoires figurant au fichier Visabio et lui enjoint de reprendre l’APU de l’intéressée et d’assurer ses besoins élémentaires.

Voir dans le même sens : Tribunal administratif de Marseille – Ordonnance n°2308684 du 22 septembre 2023


Extraits de l’ordonnance :

« […].

10. En l’espèce, il résulte de l’instruction que le président du conseil départemental, après avoir sollicité le concours du préfet en application des dispositions de l’article R. 221-11 du code de l’action sociale et des familles en vue de vérifier l’identité de Mme A, s’est fondé sur la circonstance que le relevé d’empreintes de l’intéressé correspondait à une demande enregistrée sur Visabio révélant la délivrance d’un visa à une personne nommée […] qui serait née […] 2000 pour en déduire que la requérante était majeure. Si le département soutient qu’il n’a pas mis fin à la mesure de protection mais qu’il a seulement pris acte du départ volontaire de Mme A, il lui appartenait de lui faire savoir que sa mise à l’abri n’avait pas pris fin. Il résulte également de l’instruction que Mme a présenté des documents d’identité qui tendrait à démontrer sa minorité, lesquels ont été saisis par le direction zonale de la police aux frontières. Cette saisie, qui n’a donné lieu à la remise d’aucun récépissé, n’a été suivie d’aucun rapport d’analyse tendant à remettre en cause leur authenticité. En outre, il résulte de l’instruction que Mme A n’a pas été reçue en entretien ni fait l’objet d’aucune autre mesure permettant d’évaluer son âge. Le président du conseil départemental, qui doit, lorsqu’il se prononce sur l’accueil provisoire d’urgence des personnes se déclarant mineures et privées de la protection de leur famille, se fonder sur un faisceau d’indices et dispose à ce titre de l’ensemble des moyens prévus à l’article R. 221-11 du code de l’action sociale et des familles, ne saurait se fonder sur les seules mentions contradictoires figurant au fichier Visabio sans examiner les indices pouvant lui permettre de conclure à la minorité de l’intéressée. Dans ces conditions, et alors que, compte tenu des risques encourus par l’intéressée, la demande est justifiée par l’urgence, le défaut de maintien de l’accueil provisoire de l’intéressée porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit de toute personne à bénéficier d’un hébergement garantissant la satisfaction des besoins élémentaires.

11. Par suite, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’enjoindre au département de la Gironde, à qui il incombe la prise en charge des mineurs, de reprendre l’accueil provisoire de Mme A dans une structure adaptée ainsi que d’assurer ses besoins élémentaires, et ce dans un délai de douze heures […].  »


Voir l’ordonnance au format PDF :

TA Bordeaux – Ordonnance n°2305910 du 27 octobre 2023