InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Actualités MIE > Actualités jurisprudentielles > Cour de Cassation,1e civile, 17 octobre 2018 n°18-19.427 : Un mineur isolé (...)

Cour de Cassation,1e civile, 17 octobre 2018 n°18-19.427 : Un mineur isolé guinéen présente un jugement supplétif d’acte de naissance sans tampon sec de légalisation du MAE Guinéen qui ordonne l’inscription sur le registre de l’année en cours et non sur celui de l’année de naissance, "les conditions de délivrance [des documents] demeurent obscures dès lors que l’intéressé a déclaré lors de son évaluation qu’il ne disposait d’aucun document d’identité et qu’il ne lui était pas possible de s’en procurer, ce qui jette un discrédit certain sur leur authenticité ; que de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a souverainement déduit, hors toute dénaturation, que les documents produits n’étaient pas probants au sens de l’art 47 du CC"

Publié le : vendredi 9 novembre 2018

Source : Cour de Cassation, Première chambre civile

Date : Arrêt du 17 octobre 2018 n°18-19.427

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 31 mai 2018), que M. X... a saisi le juge des enfants le 12 mai 2017 afin d’être confié à l’aide sociale à l’enfance, se déclarant mineur pour être né le [...] à Conakry (Guinée) et isolé sur le territoire français ;

Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de dire n’y avoir lieu à assistance éducative à son égard ;

Attendu que l’arrêt relève que le jugement supplétif d’acte de naissance ne comporte pas de tampon sec de légalisation du ministre guinéen des affaires étrangères et qu’il ordonne l’inscription sur le registre de l’année en cours et non sur celui de l’année de naissance, et retient que les conditions de délivrance de ce jugement supplétif d’acte de naissance et de l’extrait du registre de l’état civil de la commune de Ratoma Conakry pour l’année en cours demeurent obscures, dès lors que l’intéressé a déclaré lors de son évaluation qu’il ne disposait d’aucun document d’identité et qu’il ne lui était pas possible de s’en procurer, ce qui jette un discrédit certain sur leur authenticité ; que de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a souverainement déduit, hors toute dénaturation, que les documents produits n’étaient pas probants au sens de l’article 47 du code civil ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

***

Moyen produit par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la demande de protection de Mamadou X... et dit n’y avoir lieu à intervention au titre de l’assistance éducative à son bénéfice,

AUX MOTIFS QUE au visa de l’article 375 du code civil, la procédure d’assistance éducative est applicable à tous les mineurs non émancipés qui se trouvent sur le territoire français quelque soit leur nationalité, si leur santé, leur moralité, leur sécurité sont en danger ou si les conditions de leur développement physique, affectif, intellectuel ou social sont gravement compromises. Par application de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes en usage dans ce pays, fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenues, des données extérieures à l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Au vu des pièces du dossier, telles que rapportées ci-dessus et débattues contradictoirement, Mamadou X... a produit un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance en date du 12 avril 2017 établi sur requête du même jour et un extrait du registre de l’état civil de la commune de Ratoma Conakry lieu de naissance pour l’année en cours. Si la requête a été formée le même jour que le jugement, ce qui démontrerait l’efficacité exemplaire des juridictions guinéennes et leur souci de répondre aux attentes du justiciable guinéen, une anomalie vient entacher l’extrait d’acte de naissance qui prévoit l’inscription du jugement supplétif sur l’année en cours et non sur l’année de naissance. Cette erreur relative à l’année de transcription sur le registre d’état civil mentionné porte un discrédit certain sur l’authenticité des documents produits. Cette anomalie ne permet pas d’accorder crédit aux documents présentés qui ne peuvent, dès lors servir de base à l’établissement du passeport. Par ailleurs, aucun élément autre ne vient corroborer la minorité alléguée, d’autant que les conditions de délivrance de ces documents restent obscures, Mamadou X... ayant déclaré lors de son évaluation qu’il ne disposait d’aucun document d’identité et qu’il ne lui était pas possible de s’en procurer. Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré ;

1)Alors que le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; que l’extrait d’acte de naissance produit par M. Mamadou X... portait transcription, le 18 avril 2017, du jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance prononcé par le tribunal de première instance de Conakry, le 12 avril 2017, et précisait que ce jugement tiendrait lieu d’acte de naissance et était transcrit en marge des registres de l’État-civil de la commune de Ratoma, Conakry, lieu de naissance pour l’année en cours ; que la mention « pour l’année en cours » reproduisant les termes du jugement supplétif indiquait nécessairement l’année en cours lors de la naissance ; qu’en estimant que l’extrait d’acte de naissance prévoyait la transcription du jugement supplétif sur l’année en cours lors de la transcription et non sur l’année en cours lors de la naissance de l’intéressé, ce qui constituait une anomalie qui jetait le discredit sur les actes produits et devait entraîner le rejet de la requête, la cour d’appel a dénaturé le document en question et violé l’article 1134 dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu 1103 du code civil.