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Cour administrative d’appel de Marseille, 9ème chambre – formation à 3, arrêt du 9 avril 2019 n°18MA01824. MIE guinéen pris en charge à l’ASE à 14 ans. Fait l’objet d’une OQTF + IRTF d’un an par le Préfet. Le TA rejette sa demande d’annulation de l’arrêté préfectoral. Justifie de sa minorité par la copie d’un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance, une copie d’un acte d’état civil de transcription de ce jugement supplétif, la copie d’un acte de l’extrait d’acte de naissance analysés non conformes en ce qu’ils ne comportent pas notamment de légalisation. M.X verse aux débats ces mêmes pièces faisant désormais l’objet de la légalisation de la signature de l’officier et dont l’authenticité n’est pas contestée. Présomption d’authenticité des documents d’état civil étranger (art. 47 CC). Rejette l’identité majeure Visabio ainsi que les résultats de l’examen d’âge osseux (art. 388 CC + QPC 21 mars 2019). Eu égard à la minorité du requérant le préfet a entaché son arrêté d’illégalité (art. 511-4, 1° Ceseda). Arrêté préfectoral et jugement du TA annulés.

Publié le : mardi 30 avril 2019

Source : Cour administrative d’appel de Marseille, 9ème chambre – formation à 3

Date : arrêt du 9 avril 2019 n°18MA01824

Extraits :

« 4. M. X entré sur le territoire français en décembre 2016, après avoir quitté son pays d’origine en février 2016, a été pris en charge par les services du conseil général du Gard et été hébergé par le foyer départemental de l’enfance à compter du 3 janvier 2017. Pour justifier de sa minorité, l’intéressé se prévaut des pièces qu’il a remises aux autorités de police nationale, à savoir une copie d’un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance du 22 décembre 2016, une copie d’un acte d’état civil de transcription de ce jugement supplétif établi le 23 décembre 2016, celle d’un " extrait d’acte de naissance " délivré le 11 juillet 2015 ainsi qu’une copie d’un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance du 7 décembre 2017 et d’un acte d’état civil de transcription de ce jugement supplétif du 7 décembre 2017, établi le 12 décembre 2017. L’ensemble de ces pièces mentionne le 7 mars 2002 comme date de naissance de l’intéressé et Mamou comme lieu de sa naissance. Il ressort du rapport simplifié des services de la police de l’air et des frontières, établi le 26 septembre 2017, à la suite de l’analyse documentaire effectuée de la copie d’un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance du 22 décembre 2016, la copie d’un acte d’état civil de transcription de ce jugement supplétif établi le 23 décembre 2016 et celle de l’" extrait d’acte de naissance " délivré le 11 juillet 2015 que ces deux derniers documents en ce qu’ils ne comportent pas la légalisation par le ministère des affaires étrangères et des guinéens de l’étranger et figurent des mentions " non-conformes " telles que la numérotation, les " motifs et emblèmes " et les " cachets et tampons ", ne présentent pas les caractéristiques de document authentique. Si en première instance, ont été communiqués comme il a été précédemment, la copie d’un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance du 7 décembre 2017 et d’un acte d’état civil de transcription de ce jugement supplétif du 7 décembre 2017 établi le 12 décembre 2017 dont l’authenticité a été également mise en doute, toutefois, en cause d’appel, M. X verse aux débats ces mêmes pièces faisant désormais l’objet de la légalisation de la signature de l’officier des services d’état civil de Mamou en Guinée, par Mme M. D., attachée financière et consulaire en poste à l’ambassade de Guinée à Paris, le 3 avril 2018. Ces pièces dont l’authenticité n’est pas contestée par le préfet du Gard, corroborent tant l’identité que la date de naissance mentionnées sur la carte consulaire établie le 19 mars 2018 par le même agent consulaire, remise au requérant. Le préfet n’est pas donc fondé à contester cette carte d’identité au motif qu’elle ne serait que la transcription de mentions portées sur des documents dont l’authenticité est contestée. En outre, si la consultation des données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé dénommé " Visabio " au vu des empreintes digitales de l’intéressé, recueillies le 14 novembre 2016, par les autorités espagnoles à Melilla, qui sont présumées exactes, a fait apparaître que, connu sous l’identité de M.X celui-ci a indiqué être né le 1er mars 1995, à Mamou, les déclarations que le jeune homme reconnaît avoir tenues pour éviter d’être retenu en qualité de mineur isolé, dans cette enclave espagnole, ne sont cependant pas de nature à remettre en cause la force probante des documents légalisés précités.

5. En second lieu, selon l’article 388 du code civil : " Le mineur est l’individu de l’un ou l’autre sexe qui n’a point encore l’âge de dix-huit ans accomplis. Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé. Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur. Le doute profite à l’intéressé ". Il résulte de la décision du conseil Constitutionnel n° 2018-768 QPC du 21 mars 2019 que les règles relatives à la détermination de l’âge d’un individu doivent être entourées des garanties nécessaires afin que les personnes mineures ne soient pas indûment considérées comme majeures. Le législateur a exclu que les conclusions des examens radiologiques puissent constituer l’unique fondement dans la détermination de l’âge de la personne. Il appartient aux autorités administratives et judiciaires d’apprécier la minorité ou la majorité de celle-ci en prenant en compte les autres éléments ayant pu être recueillis, tels que l’évaluation sociale ou les entretiens réalisés par les services de la protection de l’enfance. Si les conclusions des examens radiologiques sont en contradiction avec les autres éléments d’appréciation susvisés et que le doute persiste au vu de l’ensemble des éléments recueillis, ce doute profite à la qualité de mineur de l’intéressé.

6. Au cours de l’enquête de police, M. X a subi un examen osseux, à l’issue duquel le médecin a fixé son âge à 19 ans en retenant une marge d’erreur estimée à ± 6 mois. Eu égard à ce qui a été dit au point 4 et en vertu de l’article 388 du code civil, ces conclusions ne sauraient à elles seules infirmer la valeur probante du jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance de l’intéressé, établi du 7 décembre 2017 et de l’acte d’état civil de transcription de ce jugement supplétif du 7 décembre 2017, établi le 12 décembre 2017 et constituer, à elles seules, l’unique fondement de la détermination de la majorité de M.X Dès lors, eu égard à la minorité du requérant, en lui faisant obligation à quitter le territoire français, et en prononçant à son encontre une interdiction de retour, le préfet du Gard a entaché son arrêté du 20 février 2018 d’illégalité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, M.X est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande d’annulation de l’arrêté du préfet du Gard. Le jugement du 23 mars 2018 et l’arrêté du préfet du 20 février 2018 doivent donc être annulés. »

Arrêt disponible au format pdf ci-dessous :

CAA_Marseille_09042019_18MA01824