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Conseil d’Etat ordonnance du 1er mars 2019 n°427278. MIE érythréen pris en charge à l’ASE à 17 ans jusqu’à sa majorité. Enregistre une demande d’asile du temps de sa minorité. Refus APJM par le CD. Large pouvoir d’appréciation du PCD pour accorder ou maintenir la PEC par l’ASE pour les jeunes de moins de 21 ans mais obligation de proposer un accompagnement adapté lorsqu’une PEC arrive à son terme en cours d’année scolaire ou universitaire. Difficultés d’insertion sociale de M.X dépourvu de toute ressource et soutien familial et dont l’état de santé et l’autonomie demeure précaire. Le refus de PEC du CD jusqu’à ce qu’il puisse bénéficier des conditions matérielles d’accueil au titre de l’asile constitue une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Enjoint au PCD de proposer à M.X un accompagnement (logement, besoins alimentaires et sanitaires, suivi éducatif).

Publié le : jeudi 7 mars 2019

Source : Conseil d’Etat

Date : ordonnance du 1er mars 2019 n°427278

Extraits :

« 4. Il résulte de ces dispositions que, si le président du conseil départemental dispose, sous le contrôle du juge, d’un large pouvoir d’appréciation pour accorder ou maintenir la prise en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance d’un jeune majeur de moins de vingt et un ans éprouvant des difficultés d’insertion sociale faute de ressources ou d’un soutien familial suffisants, il incombe au président du conseil départemental de préparer l’accompagnement vers l’autonomie de tout mineur pris en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance dans l’année précédant sa majorité. A ce titre, notamment, il doit veiller à la stabilité du parcours et à l’orientation des mineurs confiés au service et les accompagner vers l’autonomie dans le cadre d’un projet élaboré avec le mineur auquel doivent être associés les institutions et organismes concourant à apporter à ses besoins une réponse globale et adaptée. Lorsqu’une mesure de prise en charge d’un mineur parvenant à sa majorité, quel qu’en soit le fondement, arrive à son terme en cours d’année scolaire ou universitaire, il doit en outre proposer à ce jeune un accompagnement, qui peut prendre la forme de toute mesure adaptée à ses besoins et à son âge, pour lui permettre de ne pas interrompre l’année scolaire ou universitaire engagée. Une carence caractérisée dans l’accomplissement de ces missions peut, lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour l’intéressé, porter une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

5. II résulte de l’instruction que le département de Meurthe-et-Moselle a pris en charge M.X à compter du 22 février 2018 au titre de l’accueil provisoire d’urgence prévu par l’article L. 223-2 du code de l’action sociale et des familles puis du placement provisoire ordonné par le parquet et de la mesure d’assistance éducative prononcée à son égard jusqu’à sa majorité par le juge des enfants en application des articles 375 et suivants du code civil. Pendant cette période, l’état de santé de M.X a nécessité un suivi médical, incluant une hospitalisation, qui ne lui a pas permis de bénéficier d’un bilan scolaire mais seulement de cours de français. Le 1er juin 2018, le département a convoqué l’intéressé à un entretien, tenu le 12 juin 2018 avec l’assistance d’un interprète, en vue de préparer sa majorité qu’il devait atteindre le 1er janvier 2019. M.X ayant indiqué vouloir solliciter la protection de la France au titre de l’asile, il a été convoqué le 10 décembre 2018 pm· le dispositif de premier accueil du service d’accueil et d’orientation de Nancy puis le 17 décembre 2018 pour l’enregistrement de sa demande au guichet unique de Metz. Le même jour, le président du conseil départemental a fait connaître à M.X qu’il refusait sa prise en charge dans le cadre d’un contrat « jeune majeur » et saisi les services de l’Etat aux fins qu’il puisse être hébergé en centre d’accueil pour demandeurs d’asile à compter du le’ janvier 2019, date de sa majorité. II n’est toutefois pas contesté que cette démarche n’a pas abouti et que M.X s’est retrouvé, le jour de sa majorité, à la rue, dépourvu de tout soutien et de toute ressource ainsi que de l’assistance nécessaire à la poursuite des formalités requises par sa demande d’asile, qu’il n’apparaît pas avoir été en mesure d’accomplir.

6. Dans ces conditions, eu égard aux difficultés d’insertion sociale de M.X, qui est dépourvu de toute ressource et de tout soutien familial et dont l’état de santé et l’autonomie demeurent précaires, et alors même qu’il n’était pas en cours de scolarité, le refus du département de Meurthe-et-Moselle de lui proposer, à l’issue de sa prise en charge en qualité de mineur, toute forme d’accompagnement, y compris autre qu’une prise en charge au titre du contrat « jeune majeur » qu’il avait sollicité, propre à concourir, avec l’ensemble des institutions et organismes compétents, à une réponse globale et adaptée à ses besoins et à assurer la stabilité de sa situation et son accompagnement jusqu’à ce qu’il puisse bénéficier des conditions matérielles d’accueil du demandeur d’asile qu’il incombe à l’Office français de l’immigration et de l’intégration de lui proposer à bref délai en vertu de l’article L. 744-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est en l’espèce constitutive d’une carence caractérisée qui, compte tenu des conséquences graves qu’elle entraîne pour M.X, porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Par suite, le département de Meurthe-et-Moselle n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a, pour ce motif, enjoint au président du conseil départemental de Meurthe-et-Moselle de proposer à M.X un accompagnement comportant l’accès à une solution de logement et de prise en charge de ses besoins alimentaires et sanitaires ainsi qu’un suivi éducatif. Ses conclusions tendant à l’annulation de l’ordonnance du 9 janvier 2019 doivent par suite être rejetées. Il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M.X présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. »

Retrouvez l’ordonnance en version pdf ci-dessous :

CE_01032019_n°427278