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Tribunal administratif de Paris jugement du 25 janvier 2019 n°1820437/6-1. MIE malien évalué majeur durant APU. OQTF sans départ volontaire. Il revient à l’administration d’établir que l’intéressé est majeur. Produit un acte de naissance + jugement supplétif + attestation d’un de ses conseils mentionnant une expertise osseuse ordonnée par le juge et estimant l’âge à 16. Compte tenu de sa minorité et de son état de détresse le délai de recours de 48h ne lui est pas opposable sans porter atteinte à son droit à un recours effectif. Annule l’OQTF sans départ volontaire.

Publié le : jeudi 7 février 2019

Source : Tribunal administratif de Paris

Date : jugement du 25 janvier 2019 n°1820437/6-1

Extraits :

«  7. (...) Lorsque les conditions spécifiques d’information d’un étranger sont de nature à porter atteinte à son droit à un recours effectif en ne le mettant pas en mesure d’avertir, dans les meilleurs délais, un conseil ou une personne de son choix, elles peuvent faire obstacle, sous le contrôle du juge, à ce que le délai spécial de 48 heures prévu au II de l’article L.511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile commence à courir.

8. Aux termes de l’article L.511-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : "Ne peuvent faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français : (...) / 1° L’étranger mineur de dix-huit ans ; (...)". Il appartient à l’administration d’établir que l’intéressé était majeur à la date de la décision portant obligation de quitter le territoire et, en conséquence, qu’il ne pouvait bénéficier de la protection prévue au 1° de l’article L.511-4.

10. En l’espèce, le requérant (...) a transmis un acte de naissance malien portant sur la même identité et la même date de naissance. Il a également transmis un jugement supplétif d’acte de naissance (...). Si le président du conseil départemental a estimé dans sa décision de fin de prise en charge (...) que ces actes étaient "incohérents", il n’a pas justifié sur quels éléments précis il fondait son appréciation. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu’il aurait sollicité le concours du préfet afin de vérifier l’authenticité de ces documents, prérogative revenant à l’autorité préfectorale (...). Enfin, si le jugement supplétif (...), ne comporte pas l’ensemble des mentions qui sembles attendues, les mentions qui y sont apposées ne sont pas incohérentes avec l’identité, le lieu et la date de naissance de M.X tels que mentionnés dans son acte de naissance. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier d’une manière suffisamment claire, de nature à dispenser le président du conseil départemental de saisir le préfet afin qu’il diligente une enquête administrative, que ces actes seraient faux. De plus, aucun test osseux n’a été conduit en l’espèce antérieurement à l’intervention de la décision litigieuse. Lors de l’audience (...). M.X a produit une attestation d’un de ses conseils selon laquelle une expertise osseuse a été conduite à la demande du juge des enfants (...) et que celle-ci conclut à un âge osseux estimé à 16 ans. Eu égard au caractère circonstancié de cette attestation, établie par un avocat soumis à des obligations déontologiques, elle doit être considérée comme probante en l’espèce. Enfin, si le président du département de la Haute-Marne mentionne que le requérant a été très imprécis lors de l’entretien prévu au 1° du II de l’article R. 211-11 du code de l’action sociale et des familles sur son parcours migratoire, cette seule circonstance, qui peut aussi traduire la désorientation d’un mineur en danger, désorientation au demeurant relevée par une assistante sociale dans une attestation du 14 septembre 2018, ne permet pas de conclure à la majorité du requérant. (...)

11. La situation d’extrême vulnérabilité de l’enfant isolé est déterminante dans l’appréciation par le juge du caractère effectif de son droit au recours et prédomine à cet égard sur sa qualité d’étranger en séjour irrégulier. Elle justifie notamment que les autorités compétentes lui désignent un administrateur ad hoc qualifié afin de l’assister et d’assurer sa représentation dans le cadre des procédures administratives et juridictionnelles le concernant.

12. En l’espèce, M.X qui a été considéré à tort comme majeur par les services du département de la Haute-Marne puis par le préfet de la Haute-Marne, n’a pas été admis au bénéfice de l’aide sociale à l’enfance comme il y était fondé et ne s’est vu désigné aucun administrateur ad hoc par ailleurs. Compte-tenu de sa minorité et de son état de détresse attestée par une assistante sociale, le délai de recours de 48 heures institué par les dispositions citées ci-dessus du II de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ne lui était pas opposable sans porter atteinte à son droit à un recours effectif.

15. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu d’annuler les décisions (...) par lesquelles le préfet (...) a obligé à quitter le territoire français et a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire. » .

Retrouvez le jugement en version pdf ci-dessous :

TA_Paris_250119_n°1820437/6-1