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Tribunal administratif de Marseille – Ordonnance N°2308718 du 23 septembre 2023 – Référé-liberté – Le département a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale en ne procédant pas à l’accueil provisoire d’urgence (APU) d’un mineur isolé - Il lui est enjoint de procéder à l’APU et à l’évaluation de l’intéressé

Publié le : jeudi 19 octobre 2023

Résumé :

L’intéressé, se déclarant mineur et isolé, s’est rendu à l’ADDAP 13 afin de solliciter sa prise en charge. En dépit de sa présentation régulière auprès de ce service durant plusieurs semaines, il n’a fait l’objet d’aucune mise à l’abri et a été contraint de dormir à la rue.

Le juge des référés, statuant sur le fondement de l’art. L. 521-2 du code de justice administrative (« référé-liberté »), retient que les circonstances alléguées par le département, tenant au fait que l’intéressé est inscrit sur la liste d’attente, à l’absence de clé de répartition pour les mineurs non évalués, à l’ouverture prochaine de places supplémentaires et à l’assurance de son accueil dans le courant de la semaine suivante, ne sont pas de nature à modifier l’étendue des obligations du département en matière d’accueil provisoire d’urgence des personnes se déclarants mineures isolées. En ne procédant pas à l’accueil d’urgence de l’intéressé, le département des Bouches-du-Rhône a ainsi porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, constitutive d’une situation d’urgence.

Le département est alors enjoint, au besoin avec le concours des autorités de l’Etat, d’organiser l’accueil provisoire d’urgence de l’intéressé et de procéder à l’évaluation de sa situation.



Extraits de l’ordonnance :

« […].

8. Hormis le cas où la personne qui se présente ne satisfait manifestement pas à la condition de minorité, un refus d’accès au dispositif d’hébergement et d’évaluation mentionné précédemment qui relève, en application des dispositions des articles L. 223-2 et R.221-11 du code de l’action sociale et des familles, opposé par l’autorité départementale à une personne se disant mineur privé de la protection de sa famille, est ainsi susceptible, en fonction de la situation sanitaire et morale de l’intéressé, d’entraîner des conséquences graves caractérisant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. D’une part, en se bornant à soutenir que le requérant ne peut se prévaloir d’une présomption de minorité, le département des Bouches-du-Rhône auquel est confiée l’obligation particulière de mener des investigations telles que décrites par l’article R. 221-11, n’apporte aucun élément précis de nature à révéler que l’intéressé ne satisferait manifestement pas aux conditions de minorité et de vulnérabilité. Il résulte de l’instruction que M. X se déclarant mineur, né [...] 2007, en Guinée Conakry, isolé et sans domicile, s’est présenté le 28 août 2023 et régulièrement, trois fois par semaine à l’association départementale pour le développement des actions de prévention des Bouches-du-Rhône (ADDAP 13) afin d’être pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. Par ailleurs, son conseil a saisi également, par courriel du 4 septembre 2023, la direction départementale de l’enfance. Il n’est pas contesté que l’intéressé est inscrit sur liste d’attente. Toutefois, à cette date, aucune mise à l’abri ne lui a davantage été proposée dans l’attente d’un rendez-vous en vue de l’évaluation de sa situation. Il dort dans la rue, à proximité de la gare Saint-Charles. D’autre part, les circonstances alléguées tenant à ce que l’intéressé est inscrit sur la liste d’attente afin d’être intégré au dispositif d’accueil d’urgence à titre provisoire, au défaut de communication de la clé de répartition en vue de répartir les mineurs non accompagnés non évaluées sur d’autres départements, de l’ouverture de places supplémentaires au sein du dispositif existant actée par la "cellule de crise" le 20 septembre et l’assurance du département de l’accueil de M. X dans le courant de la semaine prochaine ne sont pas de nature à modifier l’étendue des obligations incombant à la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône en matière d’accueil provisoire d’urgence des personnes se déclarant mineures et privées de la protection de leur famille. Dans ces conditions, alors même que le juge des enfants près du tribunal judiciaire a été saisi par ailleurs, en ne procédant pas à l’accueil d’urgence du requérant et à son évaluation conformément aux dispositions précités du code de l’action sociale et des familles, le département des Bouches-du-Rhône des Bouches-du-Rhône a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, constitutive d’une situation d’urgence.

[...]. »


Voir l’ordonnance au format PDF :

TA de Marseille – Ordonnance n° 2308718