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Cour administrative d’appel de Lyon, 5ème chambre formation à 3, arrêt du 5 décembre 2019 n°19LY01538. MIE guinéen confié à l’aide sociale à l’enfance a sollicité à sa majorité un titre de séjour (TS). La préfète a refusé de lui délivrer un TS et lui a fait obligation de quitter le territoire français (OQTF) en se fondant sur l’analyse documentaire par les services de la police aux frontières qui ont émis un avis défavorable. "Le service n’a retenu au cas d’espèce que le défaut de respect de délais de recours dans la procédure interne aux services judiciaires guinéens, sans pouvoir se montrer formel quant à la conformité des documents analysés, et en prenant pour élément essentiel des renseignements diplomatiques signalant de graves dysfonctionnements généralisés de l’état civil de pays de la zone propices à la fraude. Il suit de là que ces avis reposent sur la déclinaison au cas d’espèce de ces renseignements d’ordre général sans qu’une analyse particulière des documents présentés par M. X à l’appui de sa propre situation établisse une fraude ou une contrefaçon au cas d’espèce". Le Tribunal administratif a commis une erreur de fait et la préfète a entaché sa décision de refus d’une erreur de droit de sorte que le jugement et l’arrêté sont annulés. Il est enjoint à la préfète de réexaminer la situation de M.X sous 2 mois.

Publié le : jeudi 2 janvier 2020

Source : Cour administrative d’appel de Lyon, 5ème chambre formation à 3

Date : arrêt du 5 décembre 2019 n°19LY01538

Extraits :

« 10. Pour rejeter la requête de M. X le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, d’une part, écarté un jugement supplétif du 4 décembre 2018 et un extrait du registre de transmission du 21 décembre 2018 comme dépourvus de force probante, et, d’autre part, a relevé que, pour écarter la valeur probante du jugement supplétif et de l’extrait du registre de transcription produits par l’intéressé à l’appui de sa demande, la préfète de l’Allier s’est fondée sur l’avis défavorable émis par les services de la police aux frontières, pour en tirer que l’administration renversait la présomption d’authenticité des documents remis par l’intéressé aux fins de justifier de sa minorité au moment de sa prise en charge par l’aide sociale à l’enfance.

11. Ainsi, en s’abstenant tant de vérifier l’état civil allégué par M. X en prenant l’attache des autorités guinéennes en application notamment de l’article 1er du décret du 24 décembre 2015 que de soumettre le demandeur à des examens médicaux susceptibles de révéler son âge biologique, la préfète de l’Allier s’est bornée à endosser le contenu et les conclusions de l’analyse documentaire, pour en faire le motif principal de la décision en litige.

12. Or, il ressort des rapports simplifiés d’analyse documentaire du 11 juillet 2018 produits par l’administration en défense que, pour émettre un avis défavorable, le service n’a retenu au cas d’espèce que le défaut de respect de délais de recours dans la procédure interne aux services judiciaires guinéens, sans pouvoir se montrer formel quant à la conformité des documents analysés, et en prenant pour élément essentiel des renseignements diplomatiques signalant de graves dysfonctionnements généralisés de l’état civil de pays de la zone propices à la fraude. Il suit de là que ces avis reposent sur la déclinaison au cas d’espèce de ces renseignements d’ordre général sans qu’une analyse particulière des documents présentés par M. X à l’appui de sa propre situation établisse une fraude ou une contrefaçon au cas d’espèce. Dès lors, M. X est fondé à soutenir qu’en fondant son appréciation de sa situation sur le défaut d’authenticité de ces documents, le juge de première instance a commis une erreur de fait.

13. La préfète de l’Allier, tirant déduction des renseignements diplomatiques généraux sus-évoqués, ne pouvait pas plus, dans ces conditions, opposer à M. X par la seule voie déductive de ce défaut d’authenticité de documents et de la présomption de mobile qu’il aurait antérieurement à son entrée et sa prise en charge par l’aide sociale à l’enfance acquis la majorité légale, laquelle ne ressort par ailleurs d’aucune pièce du dossier.

14. Eu égard à cet ensemble d’éléments, en estimant se trouver dispensée de l’obligation de saisir les autorités guinéennes, en vue de la vérification des documents d’état civil produits par M. B, alors que les documents présentés par l’intéressé ne pouvaient être regardés comme étant manifestement frauduleux quant à la détermination de sa date de naissance, la préfète de l’Allier a entaché sa décision de refus d’autorisation de travail portant refus de séjour d’une erreur de droit. Il y a lieu dès lors d’annuler pour ce motif la décision de refus de séjour, ainsi que par voie de conséquence les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi contenues dans l’arrêté du 23 novembre 2018.

15. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. X est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 23 novembre 2018 par lequel la préfète de l’Allier lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi, et à demander l’annulation de cet arrêté. »

Arrêt disponible au format pdf ci-dessous :

CAA_Lyon_05122019_n°19LY0538