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Tribunal administratif de Lyon ordonnance du 14 mars 2019 n°1901808. MIE malien. N’a bénéficié d’aucune mesure de prise en charge, en particulier d’hébergement, malgré l’OPP le confiant au CD de l’Ain : condition d’urgence remplie. L’absence de mise à l’abri depuis plusieurs jours et pour la nuit à venir porte une atteinte grave et manifestement illégale à l’intérêt supérieur de l’enfant et à son droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants. Enjoint sans astreinte au CD de l’Ain, responsable de la prise en charge du jeune, de prendre toutes les mesures nécessaires à sa mise à l’abri sans délai et à la Métropole de Lyon d’assurer sans délai son acheminement vers le département de l’Ain.

Publié le : jeudi 21 mars 2019

Source : Tribunal administratif de Lyon

Date : ordonnance du 14 mars 2019 n°1901808

Extraits :

«  6. Il résulte de ces dispositions qu’il incombe aux autorités du département, le cas échéant dans les conditions prévues par la décision du juge des enfants ou par le procureur de la République ayant ordonné en urgence une mesure de placement provisoire conformément aux dispositions du second alinéa de l’article 375-5 du code civil, de prendre en charge l’hébergement et de pourvoir aux besoins des mineurs confiés au service de l’aide sociale à l’enfance. A cet égard, une obligation particulière pèse sur ces autorités lorsqu’un mineur privé de la protection de sa famille est sans abri et que sa santé, sa sécurité ou sa moralité est en danger. Lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour le mineur intéressé, une carence caractérisée dans l’accomplissement de cette mission porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Il incombe au juge des référés d’apprécier, dans chaque cas, en tenant compte des moyens dont l’administration départementale dispose ainsi que de la situation du mineur intéressé, quelles sont les mesures qui peuvent être utilement ordonnées sur le fondement de l’article L. 521-2 précité.

7. M. X, ressortissant du Mali né le 21 novembre 2003, s’est présenté à Lyon où une évaluation a été réalisée le 26 février 2019 en sa qualité de mineur étranger isolé. Par une ordonnance aux fins de placement provisoire du 8 mars 2019, le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Lyon, spécialement chargé des affaires des mineurs, a ordonné que M. X soit confié à l’aide sociale à l’enfance de l’Ain. L’ordonnance de placement provisoire prend acte de ce que M. X est un mineur non accompagné, dont la santé, la sécurité et la moralité sont compromises et qu’il n’a pas été possible de le mettre à l’abri dans le ressort du TGI de Lyon. Il est constant que, depuis cette décision de placement, il n’a bénéficié d’aucune mesure de prise en charge, en particulier d’aucun hébergement et qu’il se trouve toujours à la rue. Compte tenu de cette situation, la condition tenant à l’urgence prévue par les dispositions précitées de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, contestée par le département de l’Ain, est satisfaite.

8. Compte tenu de cette ordonnance de placement provisoire du procureur de la République, le département de l’Ain est l’autorité compétente, depuis le 8 mars dernier, pour assurer la mise à l’abri du jeune M. X et, par conséquent, pour assurer la prise en charge de son hébergement et pourvoir à ses besoins. Il appartient seulement à la Métropole de Lyon, à la suite de cette ordonnance et sur la base de celle-ci, d’assurer l’acheminement de l’intéressé vers le département de l’Ain qui a ainsi en charge la mise à l’abri de ce mineur. Dans ces conditions, compte tenu de cette ordonnance aux fins de placement provisoire auprès du conseil départemental de l’Ain, alors que la Métropole de Lyon reconnaît sa compétence pour assurer ce transfert, il ne peut être retenu à l’égard de la Métropole, au moins depuis le 8 mars 2019, une carence caractérisée dans l’accomplissement de sa mission justifiant qu’à la date de la présente décision des mesures soient utilement ordonnées à son égard pour assurer la mise à l’abri du jeune M.X.

9. En revanche, et pour les mêmes motifs, il incombe ainsi depuis le 8 mars 2019 et, en tout état de cause à la date de la présente décision, au département de l’Ain de prendre les mesures de sauvegarde pour assurer la mise à l’abri du jeune M.X en vertu de l’ordonnance aux fins de placement provisoire du 8 mars 2019 du procureur de la république près du tribunal de grande instance de Lyon. A cet égard, le département de l’Ain ne peut comme il fait en défense, faire valoir que l’acheminement du jeune homme est prévu par train le vendredi 15 mars 2019 en début d’après-midi et soutenir que, dans l’attente de ce réacheminement, il incombe à la Métropole de Lyon, dont la saturation des dispositifs d’accueil a précisément justifié que le mineur soit confié à une autre collectivité, d’assurer sa prise en charge.

10. Dans ces conditions, et alors que l’absence de mesures de mise à l’abri de M. X, depuis plusieurs jours et pour la nuit à venir, porte une atteinte grave et manifestement illégale, notamment à l’intérêt supérieur de l’enfant et à son droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants, il y a lieu d’enjoindre au département de l’Ain de prendre, sans délai, toute mesure afin de proposer, dès la nuit du 14 au 15 mars 2019, un hébergement au jeune M.X. Compte tenu de l’urgence qui s’attache à la situation du jeune mineur, il y a lieu d’enjoindre à la Métropole de Lyon, si besoin est, d’assurer et d’organiser sans délai l’acheminement de l’intéressé, dès l’après-midi du 14 mars 2019, date de la présente ordonnance, vers l’Ain.

11. Par ailleurs, la compétence des autorités titulaires du pouvoir de police générale ne saurait avoir pour effet de dispenser le département de ses obligations en matière de prise en charge des mineurs confiés au service de l’aide sociale à l’enfance. Par suite, le juge des référés ne pourrait prononcer une injonction à leur égard que dans l’hypothèse où les mesures de sauvegarde à prendre excéderaient les capacités d’action du département. Compte tenu de ce qui a été dit au point précédent et de ce qu’il incombe ainsi principalement, à date de la présente décision, au département de l’Ain, subsidiairement, en cas de besoin et s’agissant du seul acheminement, à la Métropole de Lyon, de prendre les mesures de sauvegarde pour assurer la mise à l’abri du jeune M.X en vertu de l’ordonnance aux fins de placement provisoire du 8 mars 2019 du procureur de la république près du tribunal de grande instance de Lyon, il ne saurait être mis à la charge du préfet du Rhône, dans le cadre de ses pouvoirs de police générale, d’assurer le logement et la satisfaction des besoins du jeune M.X, en lieu et place désormais du département de l’Ain.  »

Retrouvez l’ordonnance en version pdf ci-dessous :

TA_Lyon_14032019_n°1901808