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Juge des libertés et de la détention, Tribunal judiciaire de Lille, ordonnance du 17 mars 2020, N°RG 20/00633. Ressortissant colombien a fait l’objet d’une mesure de placement en rétention administrative afin de permettre la mise en oeuvre d’une décision d’éloignement vers son pays d’origine. Le Juge des libertés considère que, le maintien en rétention contrevient nécessairement aux directives de l’OMS ; que dans un contexte où de nombreux pays ferment leurs frontières, la perspective d’éloignement de l’étranger, apparaît des plus hypothétiques dans le délai de la rétention et que, le risque sanitaire généré par le maintien de l’étranger en rétention apparaît manifestement disproportionné au regard des perspectives d’éloignement. Le juge dit n’y avoir lieu à la prolongation du maintien en rétention de M.X.

Publié le : lundi 23 mars 2020

Source : Juge des libertés et de la détention, Cour d’appel de Douai

Date : ordonnance du 17 mars 2020, N°RG 20/00633

Extraits :

« Sur l’incompatibilité du maintien en rétention avec la situation sanitaire actuelle et l’absence de perspective d’éloignement :

Le conseil constitutionnel, dans une décision en date du 20 novembre 2003 a indiqué "l’autorité judiciaire conserve la possibilité d’interrompre à tout moment, la prolongation du maintien en rétention, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient".

En l’espèce, le maintien de 73 personnes en état de promiscuité et d’enfermement dont certaines sont originaires ou ont traversé des pays fortement impactés par le COVID-19 comme l’Italie ou le Moyen-Orient, favorise ainsi leur contamination réciproque au sein de l’établissement, alors qu’elles sont destinées nécessairement à être remise en liberté, soit parce que l’administration parvient à les éloigner vers un pays étranger, soit sur le territoire national parce qu’elles sont libérées par l’autorité judiciaire ou à l’issue de la durée maximum de rétention. Dès lors, le maintien en rétention contrevient nécessairement aux directives de l’OMS qui qualifie la situation mondiale du COVID-19 de pandémie, et recommande la mise en oeuvre de mesure pour limiter le risque d’exportation ou d’importation de la maladie.

Par ailleurs, dans un contexte où de nombreux pays ferment leurs frontières et où les vols au départ du territoire français sont suspendus a minima pour 30 jours, la perspective d’éloignement de l’étranger, si elle n’est pas totalement absente, apparaît des plus hypothétiques dans le délai de la rétention.

Dès lors, le risque sanitaire généré par le maintien de l’étranger en rétention, tant pour lui-même que pour autrui, apparaît manifestement disproportionné au regard des perspectives d’éloignement. Il n’est par ailleurs fait état par la préfecture d’aucun trouble à l’ordre public ou menace d’atteinte aux personnes susceptibles d’être généré par la remise en liberté de l’intéressé, ce dernier s’étant vu notifier une simple ordonnance pénale pour un vol, alors qu’il n’était antérieurement pas connu de la justice.

Dans ces conditions, sans nécessité d’examiner le troisième moyen, il ne sera pas fait droit à la requête en prolongation de la préfecture. »

***

Ordonnance disponible au format pdf ci-dessous :

CA_Douai_17032020_N°RG_20/00633